Les quatre grandes fédérations hospitalières (FHF, FHP, FEHAP, UNICANCER) poussent un « cri d'alarme » unitaire sur la dégradation des conditions d'activités de soins dans leurs établissements, dont les compteurs virent au rouge vif.
Mardi dernier, fait rare, les présidents des quatre fédérations ont décrit ensemble la situation financière détériorée du secteur sanitaire et médico-social. L'hôpital public devrait enregistrer à la fin de l'année un déficit compris « entre 1,1 et 1,3 milliard d'euros », a déploré Frédéric Valletoux, patron de la Fédération hospitalière de France (FHF).
Dans le privé commercial, ce sont 145 établissements de médecine, chirurgie et obstétrique qui sont dans le rouge (soit 30 % du parc) à hauteur de 150 millions d'euros (cumulé) en 2018, a déploré le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) Lamine Gharbi. Cinq cliniques ont même mis la clé sous la porte cet été.
Dans une moindre mesure, les 700 cliniques privées à but non lucratif de la FEHAP affichent un déficit cumulé de 70 millions d'euros en 2017. Et si les 18 centres de lutte contre le cancer français étaient à l'équilibre en 2017, la balance penche suffisamment du mauvais côté en 2018 (10 à 15 millions de déficit attendu sur un tiers des centres) pour que le Pr Patrice Viens, président d'UNICANCER, exige « un coup de barre » financier « significatif ».
Ces difficultés budgétaires vont de pair avec un sentiment d'incompréhension sur les moyens octroyés pour mettre en œuvre le plan santé du gouvernement – pourtant soutenu par les fédérations. Après un effort d'économies de 960 millions d'euros en 2018, la mise à contribution du secteur pour 2019 ne passe pas. « Si le PLFSS [budget de la Sécu, NDLR] 2019 devait être le premier rendez-vous de la grande transformation annoncée de notre système de santé, c'est un rendez-vous raté ! », a tonné Frédéric Valletoux. Très affectée l'an passé, la FEHAP ne cache pas son « énorme inquiétude » par la voix de son président Antoine Dubout pour la suite.
Cesser d'éponger les dérapages de la ville
Les fédérations réclament six mesures immédiates et un rendez-vous collectif à Matignon et à l'Élysée. Avant tout, elles souhaitent le dégel complet de la réserve prudentielle de 415 millions d'euros mise de côté au début de l'année. Les hospitaliers ne veulent plus qu'une partie de ces crédits soient transférés… à la ville pour éponger les « dérapages » sur les dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) des médecins libéraux. « On ne veut plus payer pour les autres, gronde Lamine Gharbi. Nous, on est dans les clous, donc on nous doit cette restitution votée par la représentation républicaine ! » Les fédérations pèsent de tout leur poids pour que le gouvernement active un système de régulation financière direct de la médecine de ville. Une idée qui fait son chemin dans la tête d'Agnès Buzyn, à l'écoute de la Cour des Comptes.
Pour davantage de lisibilité budgétaire, les hospitaliers exigent aussi que les objectifs de dépenses fassent l'objet d'une programmation « pluriannuelle ».
Surtout, en anticipation de la campagne tarifaire 2019 attendue au 1er mars, les hospitaliers demandent une « augmentation minimum des tarifs de 1 % », pour « maintenir » leur budget respectif. En 2018, les baisses tarifaires étaient de 0,9 % pour les cliniques, 1,2 % pour l'hôpital et 1,7 % pour le privé à but non lucratif. Les fédérations veulent au passage que le gouvernement remette à plat la réforme de la tarification des transports inter-établissements, qui fait l'unanimité contre elle.
Enfin, elles souhaitent être associées à la réflexion sur la « tarification à la pertinence », ouverte dans le cadre de la réforme des modes de rémunération, de financement et de régulation. Histoire d'éviter toute nouvelle mauvaise surprise.
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