Si les services d'urgence sont au centre des attentions, à la veille de la remise au gouvernement des conclusions de la mission « flash » du Dr François Braun, les « médecins des étages » (toutes spécialités) voudraient également se faire entendre.
Pour documenter la « criticité de la situation » dans leurs hôpitaux, la conférence des présidents de commission médicale d'établissements (CME) des centres hospitaliers (CH) ainsi que des commissions médicales de groupement (CMG) des groupements hospitaliers de territoire (GHT) ont mené une enquête auprès de 213 établissements, du 27 mai au 14 juin. Résultat : « une situation et des perspectives très inquiétantes ».
Crise de l'hôpital tout entier
En effet, les deux tiers des établissements signalent une « difficulté majeure » et 97,6 % la « pressentent » d'ici à 2023. « Nous n'assistons pas à une crise des urgences mais à une crise de l'hôpital public tout entier », insiste le président de la conférence nationale des présidents de CME de CH, le Dr Thierry Godeau, auprès du « Quotidien ».
Confirmant les données de l'enquête de la Fédération hospitalière de France (FHF) sur les ressources humaines, cette nouvelle étude fait état de difficultés de recrutements médicaux dans 70 % des services d'urgences et dans plus de 40 % des services de soins critiques, de périnatalité, de médecine, de soins de suite et rééducation (SSR) et de psychiatrie.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les pénuries de personnels aboutissent partout à des fermetures de lits. Dans cette enquête, 74,1 % des présidents de CME signalent des fermetures en médecine, 45,3 % en psychiatrie, 44 % en chirurgie, 32 % en soins critiques et 20,7 % en périnatalité. Dans ce contexte, la conférence des présidents de CME déplore le manque de coordination des fermetures de lits au sein des GHT, laquelle n'est mise en œuvre que dans 42 % des groupements.
Cette enquête confirme aussi celle de la FHF sur l'état des déprogrammations. Parmi les présidents de CME qui y ont répondu, 32,7 % font état de reports d'interventions chirurgicales et 17,1 % de reports en médecine. Les difficultés se retrouvent tout au long de la chaîne : 61,7 % des établissements de SSR ont des lits fermés comme 41,6 % des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD). « Les difficultés de l'aval des urgences sont aussi le témoin de celles de l'aval de l'hôpital » commente la conférence.
S'agissant des urgences, une enquête complémentaire a été réalisée entre les 3 et 14 juin auprès de 111 présidents de CME et de CMG. Selon ce coup de sonde, 24 % de leurs services ferment des lignes de garde partiellement la nuit et 13 % totalement. Deux services ont totalement fermé et 34 % s'arrêtent au coup par coup.
Rémunération de la permanence de soins
Pour répondre à cette crise, les présidents de CME réclament très majoritairement des mesures fortes dont plusieurs sont dans les tuyaux de la mission Braun comme l'augmentation « substantielle » de la rémunération de la permanence des soins et du temps de travail additionnel. Remontent également des « parlements médicaux » les revendications de l'alignement de tous les PH sur la nouvelle grille avec un gain de quatre ans d'ancienneté, « l'amélioration immédiate des conditions d'exercice » ou encore des gains de trimestres de retraite pour la participation à la PDS.
À très court terme, des « plans de continuité des soins » associant l'ensemble des acteurs sont réclamés par 84 % des présidents de CME, également en écho avec la FHF. Selon eux, ces plans devront s'accompagner d'une régulation obligatoire avant passage aux urgences (pour 66 % des répondants), être assortis d'une organisation territoriale ambulatoire de la continuité des soins non programmés en journée (pour 58,9 % d'entre eux) et d'une permanence des soins en soirée et le week-end « dans le cadre d'une responsabilité collective » (pour 53,1 %).
Compréhensifs des difficultés de leurs confrères de ville, les présidents de CME ne demandent pas pour autant le retour de l'obligation individuelle de la garde en ville.
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