Gérard Vincent : « Ca va être très dur »

Publié le 28/02/2010
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Crédit photo : S Toubon

LE QUOTIDIEN – Des tarifs gelés en 2010, c’est une mauvaise nouvelle pour l’hôpital public ?

GÉRARD VINCENT – La crise économique est là. Personne ne peut faire comme si elle n’existait pas. Alors sauf à penser que le gouvernement privilégie la santé sur tout le reste, on ne pouvait pas espérer d’envolée tarifaire… Dans ce contexte, je ne conteste pas la nécessité de freiner la croissance des dépenses. Mais ça va être très dur.

Comment les hôpitaux peuvent-ils faire face à ce mouvement ?

Cela nous oblige à trouver des gains de productivité inégalés à ce jour. Ce qui veut dire : suppression d’emplois. On ne licencie pas, bien sûr, mais on ne remplace pas une partie de ceux qui partent – et quand je dis « une partie », cela signifie aussi, attention, que l’hôpital continue à mettre des emplois sur le marché du travail.

En terme d’emplois, précisément, il reste une marge de manœuvre ?

L’hôpital ne va pas geler tous les emplois mais oui. Ceci étant, il faut être créatif et inventif et se réorganiser – c’est ce qu’est en train de faire l’AP de Paris. Car le risque d’une baisse des effectifs, c’est qu’elle aboutisse soit à la dégradation de la qualité des soins, soit à une augmentation de la quantité de travail des personnels. Pour éviter ces deux écueils, la seule solution, c’est, je le répète, la réorganisation.

À l’AP-HP, que vous citez, cette réorganisation a ses détracteurs…

On peut dire « c’est un scandale ! », agiter « la catastrophe annoncée de la fin du service public hospitalier ». On peut aussi réagir et être intelligent. Il y a tout de même des disparités énormes entre établissements. Si on était tous du même niveau, on pourrait dire qu’il n’y a plus de marges de manœuvre, mais ce n’est pas le cas.

En même temps qu’il met les tarifs au taux zéro, le ministère estime que l’activité hospitalière va augmenter de 1,7 % cette année. Que pensez-vous de cette estimation ?

C’est ce qu’on appelle la course à l’échalote. Pour l’hôpital, ce n’est pas si mal puisqu’il reprend des parts de marché aux cliniques privées… Reste que le système – dont je continue de penser qu’il est éthique avec des tarifs uniques – contient un risque pervers et peut conduire à des actes inutiles ou à la sélection les patients pour équilibrer les budgets.

L’ONDAM hospitalier a été fixé à + 2,8 %. Dans le détail, les tarifs sont gelés, l’activité va grimper de 1,7 %, les enveloppes rétribuant les missions d’intérêt général de 2,83 % (ce qui correspond à 0,3 point d’ONDAM). On arrive donc à des crédits hospitaliers en hausse de 1,7 + 0,3 %. Les comptes n’ont pas l’air tout à fait ronds ?

Il y a effectivement un gap que nous ne nous expliquons pas. À tel point que l’on peut se demander si l’on n’est pas déjà à l’ONDAM de 2 % envisagé par Éric Woerth pour les années à venir…

 PROPOS RECUEILLIS PAR KARINE PIGANEAU

Source : Le Quotidien du Médecin: 8718