Du pressing à la manucure

La conciergerie privée de l'hôpital de la Croix-Rousse fait grincer des dents

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Publié le 27/06/2016
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croix rousse

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Crédit photo : Guillaume Bouvy

Le service de conciergerie privé, dont la société privée Happytal a la charge, vient d'être mis en place sur le site de la Croix-Rousse (HCL) à Lyon. Trois points proposant de multiples services (coiffeur, épilation, pressing, corbeilles de fruits…) sont ouverts de 10 heures à 19 heures sept jours sur sept.  

Implantée déjà au sein de neuf hôpitaux, dont la plupart en Ile-de-France, la structure est dirigée par d’anciens consultants du cabinet McKinsey, qui ont conseillé dans le passé un certain Nicolas Sarkozy. En parallèle, un nouveau service de restauration est proposé aux HCL par Lagardère Travel Retail. Les soins publics seraient-ils en passe de se privatiser ? C’est ce que redoute et déplore le Dr Nicole Smolski, présidente de l’Intersyndicale Action praticiens hôpital (APH). « Je trouve choquant que des services que pourrait assurer l’hôpital public soient confiés à des sociétés privées, énonce-t-elle. Il s’agit clairement d’une réponse libérale apportée aux carences du service public. » 

La chambre individuelle passe de 64 à 74 euros

De son côté, Jean-Claude Téoli, directeur de l’établissement, tempère : « Dans une approche de concurrence, voire de compétition, surtout pour l’hôpital de la Croix-Rousse, qui doit faire face à d’autres cliniques de ville, nous recherchons une image de qualité de service et la meilleure prise en charge possible. C’est dans cet objectif que nous avons choisi une offre qui va nous différencier dans l’hôpital public. »

Les services de conciergerie et de restauration — un chef étoilé a même été employé sur le site d’Edouard-Herriot — profitent également au personnel. « Qu’il s’agisse du pressing, des fleurs ou de la presse, nous travaillons exclusivement avec des prestataires locaux », précise Jean-Claude Téoli. Cette opération n'est pas sans conséquence pour les patients. Les HCL ont en effet augmenté de 64 à 74 euros le tarif d’une chambre individuelle, peu importe que le patient ait recours au service de conciergerie ou non. L’argument avancé pour justifier cette hausse est la difficulté à gérer la coexistence de deux tarifs. « Il n’y a ni gain ni perte pour les HCL sur cette offre », nous indique la direction.

En février, « Entreprise & Carrières » indiquait que McKinsey avait été le cabinet désigné par les HCL pour les « aider à réaliser leur programme de réduction des coûts et d’efficacité opérationnelle. La conciergerie est d’ailleurs censée améliorer les recettes de l’institution », avançait le journal.

Le stationnement, nouvelle manne financière ?

Autre pilule difficile à avaler : le stationnement. Depuis 2012, se garer dans l’enceinte de l’hôpital de la Croix-Rousse est payant (45 minutes ou 30 minutes gratuites selon les zones, puis 50 centimes par tranche de 15 minutes). Comme le déplore le Dr Smolski, « le personnel qui habite dans le même arrondissement n’a pas le droit de venir se garer… le pire c’est que cette politique va être étendue à tous les hôpitaux, y compris là où cela ne se justifie pas. » Si officiellement les raisons avancées par la direction tournent autour de la sécurité, l’environnement et la rotation des voitures, tout à fait compréhensible en pleine ville, cela l’est beaucoup moins dans des zones et villes périphériques de la région lyonnaise (Lyon Sud à Saint-Genis-Laval et Pierre-Bénite par exemple).

Guillaume Bouvy

Source : Le Quotidien du médecin: 9508