LE QUOTIDIEN : Comment la baisse des tarifs 2015 va-t-elle se traduire pour les cliniques MCO ?
LAMINE GHARBI : 15 % de nos établissements vont sombrer dans le rouge, en sus des 30 % déjà en grande difficulté financière. Avec cette baisse, le gouvernement reprend les avantages du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) et les allégements de charge du pacte de responsabilité.
Certaines cliniques vont licencier, d’autres mettront la clé sous la porte. Environ 10 000 salariés risquent de perdre leur travail. Des établissements devront leur survie à la seule intervention d’un actionnaire, qui compensera les trous de trésorerie. Tous n’auront pas cette chance. Les cliniques isolées, indépendantes, ne parviendront jamais à assumer leurs charges. Elles seront les premières victimes, même si celles appartenant aux groupes régionaux ou nationaux sont loin d’être à l’abri. Tous nous envoient des signaux d’alerte et d’incompréhension.
Ce coup de rabot est-il réellement une surprise ?
Les discussions avec le cabinet ne laissaient en rien présager un tel choc, une telle agression à notre encontre. On s’attendait à une baisse de 1 %. C’était une douleur supportable... Ce qu’on nous impose aujourd’hui est insoutenable. Alors que nous sommes en sous exécution de l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM), on nous ponctionne une nouvelle fois un volume d’activité de 2 % sur nos tarifs, sans justification. Clairement, le gouvernement vient de voler 250 millions d’euros sur le financement des soins aux cliniques.
La semaine dernière, vous avez annoncé des « mesures de rétorsion »…
Le comité exécutif de la FHP va arrêter les décisions qui s’imposent mercredi prochain. Nous allons entrer en rébellion contre toute disposition, obligation ou mission qui ne concernent pas le soin. On réfléchit à des mesures sur la formation des étudiants infirmiers, des aides-soignants et des masseurs-kinésithérapeutes. Nous allons amplifier nos recours auprès de la Commission européenne sur la reprise du CICE et des allégements issus du pacte de responsabilité et pour distorsion de concurrence.
On va évidemment attaquer l’arrêté tarifaire, sans oublier toutes les décisions des agences régionales de santé en faveur des hôpitaux publics.
À vous entendre, la guerre public-privé repart de plus belle…
Nous ne supportons plus de voir des millions d’euros partir dans les poches de l’hôpital sans aucune notion d’efficience et de service rendu alors qu’on nous impose des mesures dogmatiques et injustes. 400 millions d’euros viennent encore d’être accordés aux établissements publics pour compenser leur incurie de gestion avec les emprunts toxiques.
Nous nous étions engagés à redistribuer la totalité [des avantages] du pacte de responsabilité à nos salariés, en créant 2 700 nouveaux emplois d’avenir et de génération. Du coup, on a stoppé net les négociations de branche. C’est terminé. Notre divorce avec Marisol Touraine est consommé. C’est pourquoi nous avons fait appel à François Hollande : pour qu’il rende raison à sa ministre. Ou qu’il en change.
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