DES DOCTEURS ambulants qui exigent des tarifs prohibitifs. Des directeurs d’hôpital qui proposent des petits arrangements illégaux - gardes en surnombre, revenu à temps plein en échange d’une présence à temps partiel... Une administration qui ferme les yeux sur des dérives pourtant fréquentes.
En plein essor, le marché de l’exercice médical temporaire à l’hôpital évolue hors de tout contrôle. Même les praticiens hospitaliers titulaires s’y adonnent par endroits : certains font des ménages à l’hôpital d’en face sur leurs congés et repos de sécurité. Jamais l’Ordre ne les sanctionne, alors que cet exercice irrégulier de la médecine pourrait être passible de suspension temporaire. « L’Ordre n’a jamais été saisi d’une plainte sur ce sujet, se défend le Dr François Simon, président de la section exercice professionnel, au conseil national de l’Ordre des médecins. Si personne ne nous en parle, nous ne pouvons pas savoir, il n’y a pas de jurisprudence ».
Surenchère salariale.
La demande dicte l’offre, et les hôpitaux versent dans la surenchère salariale : certains spécialistes empocheraient jusqu’à 15 000 euros par mois en ayant opté pour cet exercice ambulant. Un choix qui n’est pas sans conséquence sur la sécurité des soins. Le professionnel de passage n’est pas forcément familier des protocoles et des habitudes maison, par exemple.
En 2003, l’IGAS dénombrait 2 535 médecins exerçant de façon temporaire dans 128 établissements (dont une majorité d’hôpitaux généraux). En 2013, l’effectif a plus que doublé. Ils seraient environ 6 000, jeunes, moins jeunes, voire retraités, à exercer à l’hôpital public au coup par coup, sur de courtes missions.
À l’intérim s’ajoutent les chasseurs de tête et les contrats signés de gré à gré. Chaque hôpital a bâti son réseau pour combler ses équipes parsemées. Trois spécialités sont surtout concernées : l’anesthésie, la radiologie et la médecine d’urgence.
Le député Olivier Véran, dans son rapport sur les dérives de l’emploi médical temporaire à l’hôpital, propose de réguler ce marché, en plafonnant la rémunération des contractuels et des intérimaires au salaire d’un PH au dernier échelon légèrement majoré. Le parlementaire, neurologue au CHU de Grenoble, préconise de sanctionner les « cumulards » (les PH en poste qui font des remplacements ailleurs), via une transmission systématique des plaintes à l’Ordre et au Centre national de gestion. Son diagnostic l’amène aussi à suggérer la suppression des premiers échelons de PH, pour attirer davantage les jeunes.
Autres pistes mises en avant par Olivier Véran : le développement des coopérations médicales entre hôpitaux, la création d’une bourse nationale à l’emploi informant de tous les postes à pourvoir, la multiplication des stages hors CHU durant les études de médecine, l’extension du dispositif du contrat d’engagement de service public (CESP) aux postes hospitaliers prioritaires. A contrario, le député Véran, constatant l’échec du statut de clinicien introduit par la loi Bachelot, ne propose pas de payer mieux, de façon ciblée, les seules spécialités sous tension.
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