La CGT a été tenue à l’écart. Dans les couloirs du salon Hôpital Expo Méditerranée, la semaine dernière à Marseille, on échange poignées de main et cartes de visite. Et l’on évoque les coopérations possibles entre la France, le Maghreb et le Proche-Orient.
L’accueil de patients étrangers surfacturés est déjà en marche. Premier centre de lutte contre le cancer en Europe, Gustave Roussy (Villejuif, Val-de-Marne) a ouvert la voie, l’AP-HP, premier CHU de France, a embrayé. L’accueil en mai dernier d’un émir du Golfe et de sa suite, qui avait privatisé un étage de l’hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt, avait fait grand bruit. « Je suis fier d’avoir facturé à un garde du corps une chambre à Ambroise-Paré plus cher qu’une chambre à l’hôtel Crillon », assume Martin Hirsch, directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Le message est clair : la France a une carte à jouer et ne doit pas s’en priver.
Le CHU marseillais est également sur les rangs. Quatre chambres ont été aménagées à l’hôpital Sainte-Marguerite pour des séjours en orthopédie de patients étrangers. L’offre comprendra un accueil personnalisé, une hôtellerie soignée, des sorties touristiques. Le tarif des soins sera supérieur à celui de la Sécu d’environ 30 %. L’AP-HM table sur une cinquantaine de patients la première année, et 300 000 euros de recettes. De quoi financer cinq infirmiers ou deux praticiens et demi. Les demandes du Maghreb affluent déjà. « Il y a des obstacles de langue, d’organisation, d’éthique. Il faut franchir le Rubicon avec prudence », modère Jean-Jacques Romatet, le directeur général.
Les hôpitaux des DOM, déficitaires, se montrent particulièrement intéressés. « Plusieurs millions d’euros sont espérés. La France se positionne comme le futur hôpital du monde », anticipe le Pr Suzy Duflo, du CHU de Pointe-à-Pitre.
L’accueil d’étudiants étrangers, clé du succès
La vente de services aux pays émergents est l’autre piste envisagée. Le Maroc construit des CHU. La Tunisie n’a ni PET-scan, ni gouvernance hospitalière digne de ce nom. Le Liban veut standardiser la formation de ses médecins. Tous ces pays sont en quête de partenaires étrangers.
La France, nouvelle sur ce vaste marché à l’export, veut miser davantage sur l’accueil d’étudiants et d’internes étrangers dans ses hôpitaux. Ces jeunes médecins serviront ensuite de relais, de retour dans leur pays. Pour 2014/2015, seuls quatre postes (deux à Toulouse, deux à Brest) ont été ouverts à l’internat pour les étrangers (hors Union européenne). Les vannes vont être ouvertes et l’idée fait son chemin de remplacer les actuels diplômes de formation médicale spécialisée (DFMS et DFMSA) par un statut moins précaire.
La demande étrangère d’accès au cursus français est réelle : une faculté de médecine chinoise a ainsi voulu « placer » une centaine d’étudiants par an à Angers. Décontenancée, la doyenne de la faculté angevine a décliné la demande de devis, et les Chinois se sont finalement tournés vers le Canada.
Le modèle hospitalier et universitaire hexagonal a en tout cas des opportunités pour rayonner. « Il faut exporter notre formation médicale de qualité et ne plus importer de médecins », résume pour sa part le Pr Dominique Perrotin, ancien président de la conférence des doyens.
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