« MALGRÉ L’ESCALADE des attentats, l’enthousiasme des missionnaires reste intact, assure le Dr Éric Cheysson, président d’Enfants Afghans et vice-président de la Chaîne de l’Espoir. L ’espoir qu’ils mettent depuis cinq ans dans l’action civile ne faiblit pas. » Les missionnaires, ce sont ces quelque 700 chirurgiens, médecins, infirmières, pharmaciens, personnel de radio, labo, techniciens biomédicaux qui se succèdent à l’Hôpital de Kaboul pour encadrer et accompagner les équipes locales pendant une ou plusieurs semaines et prendre en charge les enfants. L’IMFE a ouvert ses portes au cur de la capitale afghane, à côté de l’ancien hôpital Ali Abad, en ruines, et de la faculté de médecine, en août 2005. Aujourd’hui, son bilan hospitalier fait état de 10 000 admissions, 175 000 consultations, 30 000 examens de scanner, 26 000 échographies et 5 000 interventions chirurgicales (chirurgie générale, viscérale, orthopédique, réparatrice, cardiaque, ORL, neurochirurgie). « Tous ces actes, souligne le chef du service de chirurgie cardiovasculaire de l’hôpital de Pontoise, ont été effectués selon les normes et avec les équipements occidentaux. Depuis février 2009, l’hôpital de Kaboul est certifié ISO 9001. Avec 86 lits d’hospitalisation, 15 lits de soins intensifs et de réanimation, un bloc qui comprend quatre salles d’opération, il donne aux enfants afghans l’accès à une chirurgie de pointe et à des soins de qualité. Ici, nous partageons et nous transmettons le meilleur de la médecine et de la chirurgie française. »
Transfert de compétences.
Plus que de l’action humanitaire au sens de missions limitées dans le temps, c’est un transfert de compétences qui s’effectue dans la durée hospitalière auprès des professionnels locaux. Sur un effectif total de 423 temps plein, 403 Afghans collaborent à l’IMFE, sous l’égide administrative et financière de l’Aga Khan développement network, la fondation du chef spirituel de 15 millions d’Ismaéliens à travers le monde. La direction médicale reste assurée depuis le début par un jeune pédiatre allemand, qui a effectué son internat et son clinicat à Necker, le Dr Alexander Leis, entouré d’une dizaine d’expatriés. « À 90 %, l’hôpital est aux mains des Afghans eux-mêmes, ce sont eux qui en assurent désormais le fonctionnement, y compris pour les opérations à cur ouvert », se félicite le Dr Cheysson. Lui-même, avec ses missionnaires accourus de toute la France, continue sans désemparer ses navettes Pontoise-Kaboul, à raison d’un aller-retour tous les deux mois. « Évidemment, ma hantise, confie-t-il, c’est que l’électricité soit coupée et que nos locaux soient touchés par un attentat. Notre meilleure garantie, c’est l’attachement que l’ensemble de la population porte à l’hôpital et à ses équipes. Ce qui ne nous empêche de relever sans cesse le niveau des mesures de sécurité. L’espace de liberté des missionnaires s’est réduit comme peau de chagrin. Ils vivent le plus souvent en vase clos, confinés à l’intérieur de la maison médicale aménagée pour eux sur le site ; ils ne s’aventurent à l’extérieur, vers les trois ou quatre restaurants encore accessibles, protégés par des façades de béton et des sacs de sable, qu’après avoir signalé leur déplacement et en se pliant à des mesures de sécurité draconiennes ».
Davantage menacé par le risque d’implosion que d’explosion.
Moyennant quoi, à ce jour, aucune violence n’est à déplorer. L’IMFE semble sanctuarisé par la foule des enfants qu’il soigne. Au rez-de-chaussée de l’aile qui accueille les consultations, c’est chaque jour l’ambiance d’une ruche bourdonnante, constamment « surbookée », davantage menacée par le risque d’implosion que par celui d’une explosion. D’où la décision qu’ont prise les partenaires de l’hôpital : étendre l’offre médico-chirurgicale aux adultes, avec la construction d’une deuxième aile, sur trois niveaux, accolée au premier bâtiment. Consacrée à la gynécologie-obstétrique, elle fournira sur 7 000 mètres carrés un nouvel ensemble de services : unité d’obstétrique avec lits prénataux, salles d’accouchement, bloc opératoire et salles de réanimation post-natales, 10 lits de soins intensifs en néonatalogie, extension des services d’urgence et des services de diagnostic (laboratoire, radiologie, IRM), kinésithérapie, salles de consultations spécialisées en cardiologie et ophtalmologie. Des liaisons en visio-conférence permanente sont prévues avec l’hôpital Necker, à Paris. Le tout répond aux normes de sécurité médicale occidentale, dans le respect de la philosophie fondatrice de l’hôpital et représente un financement de 12 millions d’euros. Début du chantier au mois de juin. Inauguration prévue en 2011. « Nous allons solliciter l’ensemble de la communauté gynéco-obstétricienne pour faire face à cette nouvelle étape », annonce le Dr Cheysson. Le président d’Enfants afghans n’exprime aucune inquiétude sur leur mobilisation. Localement, les troubles peuvent redoubler, l’IMFE double la mise hospitalière.
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