« Beaucoup de mes collègues PCME ont déprimé après leur mandat et ont cherché à partir de l’hôpital. Il faut accepter de ne plus être dans la stratosphère. Quand votre mandat se finit, les portes se ferment du jour au lendemain », déplore le Dr Pierre Charestan. Cet urgentiste a quitté ses fonctions de président de commission médicale d’établissement (PCME) de l’hôpital Robert Ballanger, en banlieue parisienne, en 2019 après deux mandats. Il a depuis lors tout fait pour faire valoir son expertise, jusqu’à devenir conseiller médical auprès du directeur de l’ARS de Guyane. Mais la partie était loin d’être gagnée pour ce médecin qui préférait continuer sa carrière à faire autre chose que du soin.
Le « hors clinique » prend le pas sur le soin
Que faire quand on a eu des responsabilités politiques, institutionnelles ou administratives dans un hôpital alors qu’on est formé à la médecine, domaine qu’on a quitté partiellement ou totalement depuis trop d’années pour pouvoir y retourner avec facilité ? Quelle deuxième carrière envisager ? Les trois conférences de présidents de CME (CH, CHU et CHS) se sont penchées sur la reconversion professionnelle de leurs confrères à travers une vaste étude* dont les conclusions ont été remises la semaine dernière au ministère de la Santé et au Centre national de gestion (CNG).
Premier constat : les présidents de CME ne sont pas tous prêts à revenir dans le monde du soin, d’autant que pour 31 % d’entre eux, leur rôle hors clinique a un impact « significatif » sur leur travail purement médical. Seule une petite majorité (51 %) envisage de reprendre une activité clinique à l’issue de son mandat.

Lorsqu’ils l’envisagent, c’est majoritairement dans leur établissement (84 %), mais principalement à temps partiel (63 %), pour continuer à exercer d’autres activités institutionnelles, au sein ou à l’extérieur de leur établissement de référence.
Le manque d’accompagnement à la fin de leur mandat est une problématique soulignée par 85 % des PCME, que tous souhaitent voir mieux organisé, que ce soit systématique ou à la demande.

77 % d’entre eux disent manquer d’informations sur les possibilités qui leur sont offertes pour leur avenir professionnel. « Nous sommes peut-être les seuls médecins hospitaliers à avoir une vision aussi large du système de santé, qui ne profite pourtant pas de nos compétences après notre mandat », regrette le Dr Thierry Godeau, président de la conférence des CME de CH, très investi sur le sujet.
« Il faut se débrouiller avec notre réseau, confirme le Dr Alain Fuseau, PCME au sein du groupe hospitalier du Havre qui termine son mandat à la fin de l’année. Nous ne savons pas ce qui peut exister, ni ce que nous pouvons faire. Des PCME atterrissent bien dans les ARS, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), les agences, mais ce n’est pas pensé comme tel. »
Devenir le conseiller de son successeur ?
Ne pas savoir où aller ne veut pas dire ne pas avoir envie de continuer à travailler ! 63 % des PCME souhaitent ainsi poursuivre leur activité institutionnelle, dont 34 % leur mandat de président de CME, 26,4 % leur chefferie de pôle et 40,1 % leur chefferie de service. Une minorité (9,4 %) veut devenir directrice général d’établissement. Plus des deux tiers voudraient continuer à exercer d’une manière ou d’une autre dans leur établissement.
Par ailleurs, 46,3 % espèrent mener des missions ponctuelles (médiation, expertise) en tant que conseiller médical du directeur (59,1 %) ou comme conseiller médical du PCME (33,3 %) qui prendra leur succession.
* Enquête lancée en juin 2024 auprès de 262 PCME en exercice (216 CH, 17 CHU, 29 CHS)
À Niort, l’hôpital soigne aussi les maux de la planète
Embolie aux urgences psychiatriques : et maintenant, que fait-on ?
« Les Flying Doctors », solution de haut-vol pour l’accès aux soins en Bourgogne
Denis Thuriot (maire de Nevers) : « Je songe ouvrir une autre ligne aérienne pour les médecins libéraux »