Longtemps, les praticiens à diplôme hors Union européenne en France (Padhue) ont été soumis aux aléas d’une législation mouvante et à des procédures de reconnaissance des diplômes « particulièrement rigides et longues », a rappelé Victoire Cottereau, géographe de la santé et autrice d'une thèse sur le sujet, lors d’un webinaire sur le sujet organisé mi-février par « Hospimedia ». C’est donc avec beaucoup d’espoir que ceux-ci attendaient la mise en œuvre du nouveau statut de praticien associé, dont l’objectif est de simplifier et de sécuriser leur exercice. Mais la réforme tant attendue suscite aujourd’hui de nombreuses inquiétudes chez les Padhue, ainsi que chez les chefs de service des établissements.
Inscrit dans la loi Buzyn de 2019, ce statut se substituera progressivement à ceux de praticien attaché associé et d’assistant associé qui disparaîtront au 1er janvier 2023. Objectif : « offrir les mêmes conditions statutaires à tous ces praticiens le temps de la réalisation de leur parcours de consolidation des compétences ou de leur stage d’adaptation », précise le ministère.
De multiples dysfonctionnements
Concrètement, deux procédures d’autorisation d’exercice sont possibles : le concours dit d'épreuves de vérification des connaissances (EVC) et la procédure dérogatoire transitoire dite « procédure stock ». Réservée aux Padhue ayant exercé au moins deux ans à temps plein entre le 1er janvier 2015 et le 30 juin 2021, cette dernière nécessite un examen du dossier par des commissions régionales au sein des ARS et nationales au sein du CNG. Si celui-ci est accepté, on pourra éventuellement demander au médecin de suivre un parcours de consolidation des connaissances d’une durée de deux ans.
L'avantage de la réforme, selon Quentin Hénaff, responsable adjoint du pôle RH de la Fédération hospitalière de France (FHF) est sa « lisibilité ». Lors du webinaire d'Hospimedia, il a estimé que la nouvelle procédure est « suffisamment bien dimensionnée pour que tous les professionnels qui veulent pratiquer la médecine en France puissent s’y inscrire ». Ce statut unique permettra surtout donc de mettre fin à un « empilement de dispositifs ».
Un retard important
Sauf que… la procédure stock, censée se terminer le 31 décembre 2022, accuse un retard important. Sur les 4 500 praticiens (en majorité des médecins) concernés, seuls 700 dossiers avaient été traités mi-février. Pour le syndicat des Padhue, « les reports et le nombre insuffisant de réunions des commissions font qu’il est impossible d’achever le traitement des dossiers avant la date butoir ». Or, au 1er janvier 2023, la réforme prévoit que les établissements de santé devront mettre fin aux fonctions des praticiens « dès lors qu’ils ne sont entrés dans aucun dispositif d’autorisation d’exercice ». Le syndicat se demande donc « combien vont se retrouver sans emploi après le 31 décembre 2022 » parce que leurs dossiers n’auront pas été traités dans les temps.
Contactée par « Le Quotidien », la Dr Nefissa Lakhdara, secrétaire générale du Snpadhue, revendique « l’accélération de la procédure stock » pour que les dossiers soient traités le plus tôt possible, mais aussi « la prolongation de l’autorisation d’exercice des Padhue sous leur statut actuel, jusqu’à la fin de l’instruction de leur dossier ». La gynécologue-obstétricienne demande également « la disponibilité des postes » pour les Padhue qui devront réaliser un parcours de consolidation des connaissances. Les compétences spécifiques à acquérir ne sont en effet présentes que dans les CHU ou certains centres spécialisés parfois fermés aux Padhue. Elle demande donc « le respect de la maquette, selon la spécialité ».
Le casse-tête des stages
Autre problème de taille soulevé par la Dr Lakhdara : les postes ouverts pour les lauréats des EVC 2021 (1 716 Padhue sont concernés) « ne sont pas tout à fait en accord avec les parcours de formation et d’exercice attendus par les commissions d’autorisations d’exercice ». Avec la réforme, la période probatoire des nouveaux arrivants a été réduite de trois à deux ans depuis le 1er janvier 2022. Mais ce stage « est effectué sur un seul poste, sans possibilité de mobilité. Il n’y a donc pas moyen de bouger, de faire six mois dans un service et six mois dans un autre », poursuit la gynécologue-obstétricienne. Or, en médecine générale par exemple, un lauréat doit en général faire un stage en gynéco, en pédiatrie et aux urgences. Mais, « s’il ne le fait pas, il ne sera pas autorisé à exercer », s’inquiète la Dr Lakhdara qui estime que de nombreux Padhue sont actuellement « perdus ».
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