Alors que, jusqu'à présent, selon la Cour des comptes, chaque Ehpad était contrôlé en moyenne tous les 20 à 30 ans, c'est l'ensemble des 7 500 établissements de France qui vont être inspectés d'un seul coup au cours des deux ans à venir, a annoncé ce mardi le gouvernement.
Sans conteste, l'émotion soulevée par la publication du livre-enquête du journaliste Victor Castanet sur le groupe Orpea ne pouvait rester sans réponse de l'exécutif. Lors d'un déplacement dans un Ehpad public dans le Val-de-Marne ce mardi, Olivier Véran et sa ministre déléguée chargée de l'autonomie, Brigitte Bourguignon, ont sans surprise annoncé un train de mesures visant à renforcer les contrôles dans les établissements. « Parler d’émotion est un peu faible pour qualifier ce que Brigitte Bourguignon et moi avons ressenti, vous pouvez y ajouter les mots colère et indignation », a admis le ministre de la Santé, à propos de sa lecture de l'ouvrage dont les ventes ont dépassé les 100 000 exemplaires en six semaines.
Diligentés par les agences régionales de santé (ARS) en lien avec les conseils départementaux, ces contrôles de la totalité du parc des Ehpad, privés et publics, débuteront logiquement par les établissements ayant fait l'objet de signalements. Des signalements qui ne devront plus passer sous les radars, insiste le gouvernement. Ainsi, en plus du numéro vert 39 77 qui sera renforcé, une plateforme en ligne va être mise en place pour les familles et les professionnels d'ici à 2023. En outre, la commission pour la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance sera chargée, sur la base de ces retours d’expériences et des investigations de terrain, de traiter les alertes.
Référentiel HAS
« Pour recréer la confiance, nous voulons une transparence totale sur les services rendus, sur les tarifs, sur le budget quotidien alloué aux repas et sur toute une série d’indicateurs qui devront être mis à la disposition des résidents et des familles », a énuméré le ministre de la Santé.
Ainsi, le site officiel pour-les-personnes-agees.gouv.fr va être enrichi de nouvelles données : taux d'encadrement, de rotation des personnels, d'absentéisme, présence d'une infirmière de nuit et d'un médecin coordonnateur ou encore date de la dernière évaluation. Chaque Ehpad devra réaliser et publier une enquête de satisfaction tous les ans. Les contrôles de la répression des fraudes vont être intensifiés pour lutter contre les pratiques tarifaires abusives.
« Nous attendons, et nous exigeons, que la qualité devienne le maître mot », a ajouté Olivier Véran. Le contrôle de celle-ci va opportunément être facilité par la publication ce jeudi du référentiel national d'évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux de la Haute Autorité de santé (HAS). Ce référentiel servira de grille d'évaluation pour les organismes évaluateurs indépendants qui opéreront à partir de septembre. Pour l'instant, les Ehpad seront fortement incités à entrer dans une démarche d'évaluation. Mais pour la rendre obligatoire, il faudra une loi et donc attendre la prochaine législature.
Contrôle des rétrocommissions
S'agissant plus particulièrement des Ehpad privés, la pratique des rétrocommissions – une des principales révélations du livre « Les Fossoyeurs » – ne pourra plus être cachée, sans être toutefois interdite pour autant. Concrètement, les établissements devront désormais fournir une comptabilité analytique permettant de mettre en évidence les remises de fin d'année négociées par les fournisseurs sur des équipements financées par une dotation publique.
En clair, les économies générées par ces pratiques devront bénéficier aux résidents et non aux actionnaires. De plus, les capacités de contrôle sur ce champ des services de l'État (Inspections des finances et des affaires sociales, Cour des comptes) vont être renforcées et les directeurs des ARS comme les présidents des conseils départementaux bénéficieront d'un pouvoir d'alerte.
Pas de petites économies
Autre nouveauté, ces contrôles financiers concerneront non seulement les dotations « soins » financées par l'Assurance-maldie et celles pour la dépendance financées par les départements, mais aussi les budgets consacrés à l'hébergement et qui sont abondés majoritairement par les familles. Dans le viseur : les « petites » économies sur le dos des résidents (comme la suppression du fromage au menu) décrites crûment par plusieurs enquêtes journalistiques.
Enfin, les flux financiers entre les Ehpad et les maisons mères des grands groupes privés seront scrutés à la loupe, autre signe évident que l'affaire Orpea est passée par là. Le ministère dispose déjà des conclusions des inspections des affaires sociales (Igas) et des finances (IGF) au sujet de la multinationale de la dépendance. Leur rapport devrait être rendu public lundi prochain.
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