Est-ce le coup d’envoi de la réforme de la santé périnatale ? Une réunion entre les syndicats de praticiens hospitaliers – représentant les pédiatres, les anesthésistes réanimateurs, les urgentistes et les gynécologues obstétriciens – a eu lieu mardi en présence du ministre de la Santé Yannick Neuder, actant le début d’une série de séances de travail sur la périnatalité à partir de septembre 2025. « C’était étonnant que le ministre convoque les représentants en plein cœur de l’été, commente la Dr Anne Wernet, présidente du Syndicat national des anesthésistes réanimateurs élargi (Snphare). Mais au moins il a réagi à l’envoi de notre communiqué ! »
De fait, en juin, les organisations syndicales de PH avaient affiché leur opposition au moratoire sur la fermeture des maternités, voté mi-mai, dans le cadre de la proposition de loi de lutte contre la mortalité infantile déposée par le député (Liot) Paul-André Colombani. À l’inverse, les syndicats de PH adhèrent à la proposition de résolution des sénatrices Véronique Guillotin et Annick Jacquemet appelant le gouvernement à une transformation de l’offre de soins périnatals dans les territoires.
Dans un contexte où la France se classe désormais 20e sur 28 pays de l’UE concernant les taux de mortinatalité (enfants nés sans vie) et 22e s’agissant des taux de mortalité infantile, plusieurs rapports ont souligné ces dernières années la nécessité d’une réforme de la périnatalité – la dégradation de la situation de maternités fragiles étant déjà pointée par la Cour des comptes il y a dix ans. En 2023, l’Académie de médecine faisait état « d’une saturation des maternités de type 2 et 3, de la raréfaction de l’offre privée à but lucratif, de la crise d’attractivité des métiers de la périnatalité et de l’accélération de la fermeture des plus petites structures, voire des structures moyennes de 1000 à 2000 accouchements ».
Parmi les dossiers prioritaires figure la révision des vieux décrets de 1998 qui définissent les quatre types de maternités – celles de type 1 possèdent un service d’obstétrique, celles de type 2a possèdent aussi un service de néonatalogie, celles de type 2b disposent de lits dédiés aux soins intensifs en néonatalogie. Les maternités de type 3 peuvent prendre en charge des grossesses à haut risque et ont un service de réanimation néonatale. Officiellement, d'un point de vue juridique, si le décret de périnatalité de 1998 prévoit un minimum de 300 accouchements annuels, il autorise des dérogations.
Comment faire évoluer la réglementation pour concilier sécurité et proximité des soins ? Les sénatrices, dans leur rapport, préconisent des taux d’encadrement médical et paramédical et un ratio minimal d’un lit de réanimation néonatale pour 1 000 naissances. « Nous manquons d’accueil en réanimation », insiste le Dr Jean-François Cibien, urgentiste et représentant de Samu Urgences de France (SUdF), qui souhaiterait pour sa spécialité également une ligne dédiée en néonatalogie.
Ce niveau d’exigence correspond à « une forte attente des médecins », abonde la Dr Anne Wernet (Snphare) qui souhaite « une labellisation de toutes les maternités ». Une requête partagée par les nouvelles générations de médecins : « Les jeunes obstétriciens souhaitent travailler dans des grandes équipes et ont pour priorité la sécurité des soins », analyse le Dr Pascal De Bièvre, représentant du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof).
Équipes territoriales
Un autre sujet central de discussion porte naturellement sur l’attractivité. L’objectif des syndicats de PH est de mettre fin à « l’instabilité des équipes », souvent composées de remplaçants et d’intérimaires, exerçant fréquemment dans des maternités de niveau 1 à faible activité. « Nous devons réfléchir à des équipes territoriales avec des médecins qui se connaissent bien, par exemple pour intervenir en cas de complications hémorragiques », explique le Dr Jean-François Cibien. Pointant le fait que « certaines salles de naissance sont désertées par les médecins pour la permanence des soins, et afin d’éviter que des drames ne se produisent », la Dr Anne Wernet souhaite rendre obligatoire la présence d’infirmiers anesthésistes (Iade) dans les maternités, ce qui sécuriserait la pratique du médecin anesthésiste.
Alors que ces métiers subissent « une forte pression mentale », il faudra « donner envie aux jeunes pédiatres de faire des gardes et donc monter en charge dans la formation continue », argumente aussi le Dr Emmanuel Cixous, président du Syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers (SNPEH). Pour assurer une garde dans une maternité de type 3, neuf pédiatres sont requis. « Lorsque nous ne sommes que six, cela devient compliqué… », insiste le pédiatre des Hauts-de-France.
« Nous devons réévaluer le nombre de berceaux en réanimation néonatale
Dr Pascal De Bièvre
Pour mettre en place la réforme, une évaluation territoriale sera indispensable. Deux axes du groupe de travail concerneront la constitution d’un registre national des naissances et de la mortalité néonatale (annoncée pour 2026) et la réalisation d’un audit de l’offre de soins périnatals. « Nous devons aussi réévaluer le nombre de berceaux en réanimation néonatale », explique le Dr Pascal de Bièvre.
À la suite des conclusions des travaux qui devraient durer environ six mois, le ministre de la Santé a exprimé son intention de sortir rapidement les décrets d’application de cette réforme.
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