Même si le gouvernement tarde à présenter son service d'accès aux soins universel (SAS), censé être mis en place à l'été 2020 pour désengorger les urgences, la créativité, elle, n'attend pas. À Lille, une soixantaine d'étudiants pluridisciplinaires et chefs d'entreprise viennent de participer à un hackathon sur le thème porteur de l'urgence et des soins non programmés. Le principe ? Une course contre la montre de 24H pour construire sur un mode collaboratif des équipements pratiques au service des patients et des conditions de travail des soignants.
L'événement s'est inscrit dans le cadre de la démarche Concept room, que le réseau d'entreprises « Nutrition, santé, longévité » (NSL) et le CHU de Lille ont lancée dès 2011 pour créer des solutions innovantes – chambre d'hôpital du futur, service ambulatoire et EHPAD de demain, parcours de santé connecté. Le thème de ce challenge ne relevait pas du hasard. « L'accès aux urgences est dans une phase de réorganisation, souligne le Dr Vincent Brulin, PH en médecine d'urgence au CHU de Lille. Les personnels soignants vont devoir travailler avec des acteurs nouveaux du monde de l'industrie, des éditeurs et des ingénieurs réseau ou en informatique. »
Du patient à l'infirmier
La coordination rapide et fluide entre les hôpitaux, le secteur libéral (les CPTS émergentes – communautés professionnelles territoriales de santé) et le domicile sera un des défis majeurs, avec le renfort des nouvelles technologies au service des urgentistes, paramédicaux, pharmaciens, libéraux et patients.
À 19h, les jeunes se sont mis au travail – 56 étudiants en majorité issus d'écoles d'ingénieurs, de commerce, de communication, de design ou de la faculté de psychologie – répartis en huit groupes dans les salles de l'Institut Cœur Poumon. Au programme du remue-méninges : le brancard du futur (plus maniable, plus confortable), l'équipement idoine des maisons de santé pluridisciplinaires (MSP) face à une urgence, celui de l'infirmier libéral à domicile mais aussi les outils du « patient acteur de son parcours de soins » face à une urgence ressentie.
Briefés par des coachs, instruits par des professionnels en exercice (brancardiers, médecins, infirmiers), les étudiants ont planché grâce à du matériel adapté (pâte à modeler, post-it, etc.). « À minuit, ils ont visité les urgences par petits groupes » avant de peaufiner leurs concepts, raconte Maxime Chaigneau, directeur du pôle anesthésie-réanimation du CHU.
Urgentistes en aiguillon
Après un « réveil musculaire » par un coach sportif dès 6 h 30, les créateurs en herbe ont reçu la visite à 7h de médecins urgentistes venus les orienter au besoin. Ils ont ensuite présenté leurs projets en deux minutes devant un jury de professionnels (hospitaliers et libéraux) et d'industriels.
Une solution a été retenue pour chaque thème. Le jury a apprécié l'idée du brancard maniable par une seule personne, équipé au-dessus de la tête du patient d'un cocon d'isolement doté de lampes de luminothérapie et d'une caméra de surveillance, sans oublier un système de roulement à billes pour faciliter les transferts.
Au sein des MSP, un brassard d'autodiagnostic capable de prendre les constantes d'un patient dont l'état de santé s'est dégradé, relié au centre de régulation, a aussi été retenu. Également primée, une appli permettant à un algorithme de déterminer le niveau de gravité d'un problème de santé, grâce à un questionnaire à remplir par l'infirmière à domicile. Et dans la même veine, le jury a sélectionné un autoquestionnaire permettant à un patient de vérifier, seul, si son état commande d'aller aux urgences ou peut attendre une consultation en ville.
« Les industriels du cluster décideront s'ils accompagnent ces projets. L'idée, c'est que l'un d'eux soit présenté au salon Hôpital Expo en 2021 », poursuit Maxime Chaigneau, très satisfait de ce hackathon qui bouscule les habitudes et accélère l'innovation grâce à la fusion de l'expérience du terrain et du savoir-faire industriel.
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