Guerre en Ukraine, menace nucléaire, nouvelles tensions… Dans un contexte géopolitique de plus en plus tendu et incertain, « les risques NRBC [nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques] sont réellement pris en compte par tous les services de gestion de crise mais il n’y a toujours pas assez de soignants de première ligne formés », regrette le Dr Nicolas Galiano, adjoint du directeur médical du Samu 06 au CHU de Nice, formateur AFGSU (attestation de formation aux gestes et soins d’urgence) et responsable de formation NRBC.
Fort de vingt années d’expérience, l’urgentiste rappelle que cette prise de conscience des risques NRBC remonte pourtant à mars 1995, lors de l’attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo. D’autres évènements gravissimes ont suivi comme l’accident nucléaire de Fukushima, l’explosion de l’usine AZF de Toulouse mais aussi l’épidémie due au virus Ebola.
Prise en charge des victimes, habillage, isolation des locaux
Les CESU (centres d’enseignement des soins d’urgence) proposent deux formations AFGSU aux professionnels de santé civils. La première est ouverte à toutes les catégories de soignants et aborde sur trois jours plusieurs risques – dont celui NRBC.
La seconde, plus poussée, s’adresse aux personnels de première ligne – Smur, logisticiens du Samu… Dix modules sont abordés sur dix demi-journées, balayant les volets liés au risque NRBC : identification du danger, prise en charge des victimes, protection de l’environnement, habillage et isolation des locaux, caractérisation des risques d’intoxication liés aux contaminations pour les victimes et les personnels. À Nice, cette année, quatre formations ont été dispensées accueillant chacune quatorze personnes. Pour le Dr Nicolas Galiano, ce nombre de sessions reste toujours trop faible car « les établissements de santé sont frileux à laisser leur personnel partir une semaine ». Une constatation qui peut surprendre alors que ces soignants seraient forcément exposés directement en cas de catastrophe avérée.
La réserve sanitaire aussi
À ces formations AFGSU qui s’adressent aux professionnels de santé en exercice s’ajoute la formation NRBC destinée à la Réserve sanitaire (constituée de professionnels de santé volontaires et mobilisables à tout moment par le ministère de la Santé ou les agences régionales de santé). Dans ce cas de figure, ce sont des professionnels de santé réservistes qui participent à cette mise à niveau.
Les objectifs restent, là encore, la prise en charge des victimes potentiellement contaminées, l’habillage et le déshabillage, le transport des malades en housse de décontamination et les contraintes liées à ces victimes. Huit formations par an forment alors 15 soignants. Bien que ces formations soient ouvertes à l’ensemble des professionnels de santé, certains profils sont privilégiés : les urgentistes et les anesthésistes-réanimateurs car « le but est de maintenir un pool de réservistes formé à ces risques », explique Murielle Fayolle, chargé de projet et d’expertise scientifique en santé publique chez Santé Publique France (SPF).
Et de fait, la conduite à tenir face au risque NRBC est loin d’être intuitive. Jean-Yves Kerhervé, pharmacien, réserviste formateur protection face aux maladies infectieuses émergentes à SPF (dont Ebola) explique par exemple que l’habillage/déshabillage n’est pas du tout instinctif. « Les professionnels de santé ont une chance sur deux de bien le faire… Une chose est sûre : dans une situation de contamination, aucune marge d’erreur n’est possible. »
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