Après l'annonce de la suppression du numerus clausus et de la première année commune aux études de santé (PACES) dès 2020, le gouvernement a ouvert la concertation pour trouver un système qui soit « plus ouvert, plus vivant et attire des profils plus variés », tout en restant « sélectif », selon le cadrage d'Emmanuel Macron.
En attendant les arbitrages en fin d'année, des doyens et internes venus d'Allemagne et de Belgique ont exposé leur système de sélection, lors de la convention CHAM organisée sous la houlette du Pr Guy Vallancien. Et l'herbe n'est pas forcément plus verte…
Des stages d'été pour doper son profil
À quel moment faut-il sélectionner les futurs médecins ? La réponse diffère selon les pays. En France, c'est le concours en fin de PACES qui départage les étudiants (dans les filières santé contingentées) mais se traduit par un immense gâchis humain avec 25 000 étudiants en brutale situation d'échec chaque année. La réforme consistera à mettre en place une sélection plus progressive et surtout des passerelles entrantes et sortantes entre les licences.
Nos voisins allemands et belges sélectionnent les étudiants après le bac. « En Allemagne, une note globale est calculée. Elle comprend les résultats des deux dernières années du lycée et les notes du bac », explique Sophie Kläschen, interne en dermatologie à Bonn. Chaque candidat motivé par la médecine postule aux différentes facultés sans frein géographique. « Mais chaque université est libre d'ajouter ses critères de sélection. Ainsi, certaines demandent une lettre de motivation, d'autres font passer des tests de logique en plus », poursuit-elle. L'étudiant a la possibilité d'améliorer sa note finale en effectuant des stages en santé l'été pour avantager son dossier…
En Belgique, chaque région a son système. La fédération flamande sélectionne sur concours et impose depuis 2018 un quota d'étudiants. Ce nombre maximum reflète les capacités d'accueil de l'internat et correspond aux numéros INAMI (délivrés individuellement par l’Institut national d’assurance maladie-invalidité et obligatoire pour réaliser un internat et exercer). En revanche, la fédération Wallonie Bruxelles a choisi un examen d'entrée basé sur des matières scientifiques et non scientifiques telle que la communication. « Pour être accepté, il faut une note globale minimale de 10/20 et aucune note en dessous de 8/20 », commente le Pr Marco Schetgen, doyen de la faculté de médecine de Bruxelles.
Dans l'Hexagone, la conférence des doyens était favorable il y a quelques années à une sélection des carabins sur dossier avec oral après le bac, avant de faire marche arrière. « L'option était sur la table mais on a choisi de garder l'accès libre à l'université », confirme le Pr Jean Sibilia président de la conférence des doyens de médecine, qui résume la difficulté de l'exercice de tri. « Quel que soit le moyen d'évaluation, est-ce qu'on peut affirmer, à 17/18 ans : "lui, il sera bien dans les 40 prochaines années à venir "? On n'en sait rien ! ».
Stress, contournement et contentieux
Tous les modèles présentent des failles. Même après trois réformes des études en Belgique, le système wallon pose question. Le nombre d'étudiants entrant dans les facultés explose. « En 2017, 700 candidats ont été reçus, en 2018, ils sont 1 100 », détaille le Pr Schetgen. Or, le pays est confronté depuis quelques années à une pénurie de numéros INAMI. Après six années d'études, les étudiants n'ont plus la garantie d'en obtenir un ! « On a trouvé des solutions mais il y a un stress intense des étudiants », affirme-t-il.
Outre-Rhin, deux bacheliers ayant échoué à l'entrée du cursus de médecine ont fait un recours juridique. « Le bac n'est pas nationalisé chez nous et il n'y a pas de système d'équivalence : ces étudiants estimaient qu'ils ne disposaient pas des mêmes chances que les autres candidats. Notre cour constitutionnelle leur a donné raison », résume Sophie Kläschen. L'égalité des chances entre bacheliers devra être rétablie en 2019.
En France, le verrou du numerus clausus a abouti depuis longtemps à des stratégies de contournement. Interne en médecine du travail à Lyon, Antoine Reydellet a réalisé ses études en Roumanie. « Je suis parti avec une moyenne de 14,9/20 en première année de médecine, explique-t-il. Partir en Roumanie, c'est dur, c'est vécu comme un échec ! On sait que, quand on va revenir, on sera perçu comme quelqu'un ayant échoué, comme un tricheur et ça pèse… »
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