LE QUOTIDIEN : Pourquoi une refonte du 3e cycle est-elle indispensable ?
Pr BENOIT SCHLEMMER : Cette réforme est attendue par les étudiants et les internes, mais aussi par les enseignants. Le système traditionnel a vécu. La France est réputée pour sa formation clinique et pratique des jeunes médecins de bon niveau. Mais elle est défaillante dans l’évaluation des compétences professionnelles acquises par les internes tout au long de leur parcours. Des hebdomadaires publient des palmarès des établissements, on imagine mal que la formation des professionnels de santé n’offre pas les mêmes garanties ! Les futurs médecins doivent attester à l’ensemble de la population de leur expertise professionnelle. Nous devons cette évolution aux patients.
L’obtention du diplôme ne suffit-elle plus à garantir la qualité d’un médecin ?
Nous pouvons espérer qu’elle suffit mais il nous serait difficile de prouver l’aptitude d’un praticien si on nous le demandait. Nous ne disposons pas aujourd’hui de critères objectifs permettant de mesurer l’acquisition de compétences. Il n’existe pas de relevé de l’activité d’un interne permettant d’assurer, à la fin de son parcours, qu’il a bien réalisé à tant de reprises tel acte chirurgical ou suivi telle procédure. Il n’est pas interdit de penser qu’à l’avenir, la Haute autorité de santé, dont la mission est de veiller à la qualité des soins, l’exige, ou encore que des payeurs le demandent, que ce soit l’assurance-maladie ou des organismes complémentaires.
Comment comptez-vous procéder, en pratique, pour mesurer l’acquisition des compétences pendant le 3e cycle ?
Nous devons définir avec les jeunes, et avec tous les acteurs qui ont en charge la formation des futurs médecins, quelles sont les connaissances qu’un interne doit acquérir pendant son cursus et comment nous assurer que ces aptitudes sont bien acquises.
Nous projetons de mettre en place un portfolio numérique qui permettrait de suivre l’évolution de l’acquisition de ces compétences. En chirurgie, on considère que l’expertise ne vient qu’après la complétion d’un certain nombre d’actes opératoires du même type. Un urologue, par exemple, ne sera considéré compétent dans la prise en charge du cancer du rein que s’il a opéré "n" cancers du rein. Cette évolution est importante et doit s’inscrire dans la formation initiale et continue. Nous devons nous assurer que ces compétences sont mises à jour, renouvelées, tout au long de la carrière du praticien. Cela doit devenir une hygiène de vie professionnelle.
La thèse de médecine sera-t-elle supprimée ?
La recherche est un élément fort de la qualité des soins et il est important que les futurs médecins conservent un travail personnel de recherche. Mais le système peut être simplifié. Jusqu’à présent, les internes devaient préparer une thèse et réaliser un mémoire pour valider leur DES. À l’avenir, ce mémoire sera unique et servira de thèse. Il devra toujours s’agir d’un travail original lié à l’exercice de la spécialité.
Avec l’aide du coordonnateur de la discipline, l’interne devra commencer assez tôt son travail de mémoire au début de son DES de façon à l’achever à la fin de son cursus et de ne pas retarder son entrée dans la vie professionnelle. La réforme du 3e cycle doit permettre un meilleur suivi du parcours des internes de toutes les spécialités dans toute la France. Il n’y a pas de raison que la certification du parcours d’un jeune professionnel soit différente en Ile-de-France et en Aquitaine.
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