Le dernier film de T. Lilti a bénéficié d’un lancement publicitaire conséquent. Très satisfait de l’image véhiculée par Médecin de Campagne, je me suis dit que la vision de la PACES par un collègue permettrait de me replonger dans cette période vécue par mon fils et moi-même.
Bien entendu, nous sommes très critiques en ce qui concerne l’organisation de cette première année qui signe la fin d’un rêve pour la plupart des étudiants inscrits en faculté.
Malheureusement, je le suis également pour la retranscription de l’ambiance qui ne me semble pas du tout en phase avec la réalité.
Tout d’abord, on ne parle jamais dans le film des préparations privées qui foisonnent, et qui sont responsables d’une véritable inégalité entre les étudiants suivant leur niveau social. Bien entendu, le tutorat (bien représenté à mon avis) cherche à concurrencer ces écoles privées. Cependant, il aurait été important de bien voir leur difficulté à avoir une meilleure crédibilité par rapport à ces « boîtes à concours ».
Je suis tout aussi surpris de voir (et cela me rappelle le temps où je suivais les cours en première année) que nos deux héros suivent des cours en amphithéâtre avec des profs en chair et en os. Malheureusement, actuellement ce genre de pratique est devenu, dans de nombreuses universités, exceptionnel. En effet, le plus souvent les étudiants suivent les cours en visioconférence ; pratique qui majore quelque peu la déshumanisation que subissent les étudiants au décours de la première année.
Quel programme !
Le réalisateur n’insiste pas suffisamment sur le programme des études de cette première année. Le premier semestre (tronc commun ou premier quad) est surtout consacré aux maths, physique, chimie. Or, en première année de médecine, nombreux sont les étudiants venant d’une autre filière comme math sup, et qui de ce fait arrivent plus facilement à rafler les places aux passionnés par la médecine. Ces derniers ne sont pas nécessairement des férus de sciences fondamentales. Malheureusement, ce sont ces matières qui servent en grande partie à sélectionner les étudiants. De cette manière, allons faire de bons médecins ou de bons techniciens ?
Un autre détail peut quelque peu froisser certains étudiants. En effet, on note dans ce film une suprématie de la filière médecine par rapport aux autres proposées (sage-femme, kinésithérapeute, dentaire). Or actuellement les chirurgiens-dentistes ne sont plus les arracheurs de dents comme autrefois, mais de réels professionnels qui concurrencent les stomatologues (d’ailleurs cette spécialité n’existe plus) dans l’implantologie notamment. De plus cette discipline est souvent prisée par certains étudiants qui la choisissent alors qu’ils sont bien classés et pourraient devenir des médecins. Aussi, il est quelque peu opportun de ne pas mettre en lumière cette nouvelle donne qui change quelque peu les idées reçues sur une profession très honorable.
D’autre part, la réelle casse psychologique survient souvent en fin de concours lorsque les étudiants s’aperçoivent que leur sacrifice s’est révélé inutile. Il est aisé de comprendre la détresse de ceux qui, à la suite de deux années de travail acharné, doivent se résoudre à changer de filière. Ils croient être des ignares alors qu’ils ne sont que les victimes d’une machine à broyer les cerveaux. Bref, la PACES est une année inhumaine pour les jeunes bacheliers qui vivent d’illusions en arrivant sur les bancs de l’université ; illusion qui devient souvent cruelle pour leur propre ego.
Tout cela pour dire que ce film est quelque peu décevant, car il ne s’agit que d’une bleuette pas très réaliste (le sacrifice d’un des protagonistes après une année de travail acharné est quelque peu surprenant).
La réalité de cette première année est bien plus cruelle à tous les niveaux (solitude fréquente, mépris de certains étudiants, exclusion d’un système de colle privé très onéreux), et mérite une réelle prise de conscience de la part des doyens pour éviter une telle « boucherie ».
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