Il y a les passionnés, les épuisés et ceux qui sont à la recherche d’un second souffle. Début avril, le « Quotidien » a sondé une soixantaine de ses lecteurs. Des généralistes, des urgentistes ou des obstétriciens qui aspirent à changer de spécialité, après plusieurs années d’exercice. Dans ce panel, la dermatologie et la médecine du travail étaient les disciplines le plus souvent envisagées.
Souvent, les confrères évoquent un intérêt pour la nouvelle spécialité nourrie par des années de pratique, comme ce généraliste qui envisage la dermatologie car il « pratique déjà beaucoup les excisions de lésions », ou cet autre qui, après avoir réalisé un DIU en gynécologie « ne réalise que des consultations de gynécologie ». « Changer de spécialité pourrait notamment m’offrir la possibilité de participer à des formations qui sont non ouvertes aux généralistes et prendre en charge de façon plus complète les patientes », témoigne-t-il. Grand écart plus important, un obstétricien raconte comment son exercice l'a poussé vers la psychiatrie. « J'écoute beaucoup mes patientes, qui se mettent à me parler et me faire part de leurs difficultés, leurs angoisses, leurs inquiétudes », raconte-t-il.
Une poignée de praticiens confesse plutôt une ambition ancienne, manquée à cause d’un classement insuffisant au concours de l'internat. « J’aime la cytologie et l’histologie depuis la première année de médecine, je me suis beaucoup intéressé à l’anapath des cancers gynécologiques en tant que chirurgien gynécologue », se souvient l’un d’entre eux.
Des envies de changer qui se sont généralement heurtés jusqu'à présent à la réglementation. Comme pour ce médecin biologiste qui rêve de devenir chirurgien orthopédiste depuis le début de son internat - jusqu'à reprendre des stages au bloc il y a quatre ans - mais qui a vu son rêve douché en une seconde par l’arrêté d'ouverture de postes. À la rentrée prochaine, aucune place en chirurgie orthopédique ne sera ouverte au titre de second DES.
« Après déjà cinq ans d'internat dans une spécialité qui ne me plaît pas, je devrais encore faire trois ans, et n'avoir aucune certitude que des postes seront ouverts », déplore aussi un médecin du travail qui souhaite depuis 2017 se réorienter en santé publique. « Il n'existe plus de Desc, de mise à niveau en médecine générale. Cette situation est terrible et je suis sans solution », regrette-t-il.
Lassitude
Au gré des témoignages, beaucoup évoquent surtout la « lassitude de la spécialité exercée » et l’envie de « donner un second souffle » à leur activité, à l’instar de cette médecin du travail qui rêve de dermatologie et regrette que sa discipline ne « corresponde plus au métier premier pour lequel je m'étais engagée il y a 20 ans », décrivant un exercice « trop bureaucratique, plus assez technique et trop conflictuel ».
Face à des « conditions de travail de plus en plus pénibles », au « ras-le-bol de la Cpam » et aux « contraintes de l’exercice », les généralistes sont particulièrement nombreux - la moitié du panel - à envisager une reconversion, par exemple en dermatologie, cardiologie, endocrinologie ou allergologie. Les urgentistes, eux aussi, imaginent un changement de carrière pour « mieux vivre », résume l’un d’entre eux, un aspirant gériatre, qui souhaite aboutir à « une réduction du temps de travail, l’arrêt des gardes et des astreintes ». « Je suis usé », raconte un autre urgentiste potentiel candidat à un poste de biologiste.
Enfin, plus terre à terre, deux praticiens évoquent sobrement « l’argent » comme motivation pour changer de spécialité, l’un généraliste aspirant biologiste, l’autre hépatogastroentérologue qui rêve de devenir médecin nucléaire.
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