Mauvaise passe parlementaire pour les carabins !
Après avoir lancé une pétition – qui frôle les 20 000 signataires – en riposte aux amendements coercitifs de certains députés anti-liberté d'installation, la présidente de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), Clara Bonnavion, a écrit une lettre à Agnès Buzyn (Santé) et Frédérique Vidal (Enseignement supérieur) pour exprimer son désarroi au sujet, cette fois, du report d'un an de la réforme du 2e cycle des études médicales et de la fin des ECN, confirmé dans nos colonnes par Agnès Buzyn. La représentante des carabins demande aux deux ministres des engagements pour que se concrétise cette réforme « ambitieuse et indispensable ».
Agacée, la présidente de l'ANEMF rappelle l'historique de la « promo fiasco » de 2017 confrontée à annulations d'épreuves lors des ECNi et déplore qu'une promotion supplémentaire s'expose au schéma destructeur du cursus actuel. « La pression, le mal-être et le non-sens présents dans nos études, mis en lumière à travers cette "promo fiasco", vous avaient amenées à annoncer la fin de l’ECN pour les étudiants entrant en deuxième cycle à partir de la rentrée 2019 », rappelle justement Clara Bonnavion.
Las, quelque 8 000 étudiants actuellement en troisième année ont appris qu’ils n’allaient finalement pas échapper « à trois années d'externat destructrices », restant soumis à l'ancien régime. L'amendement adopté en commission des affaires sociales, validé par Agnès Buzyn, reporte d’un an la réforme du 2e cycle et donc la suppression des ECN, « contre la volonté des étudiants ».
Réforme floue
Or le besoin de réforme est urgent, martèle la présidente de l'ANEMF. Le deuxième cycle actuel ne permet pas d'acquérir « toutes les compétences nécessaires », ni de découvrir la pluralité des modes d'exercice et des territoires. Il empêche les externes de construire « un véritable projet professionnel ». « Ce manque de sens criant des études est l’un des responsables de la santé mentale dramatique des étudiants. Plus de deux tiers souffrent d’anxiété, 27 % de dépression et 24 % ont déjà eu des idées suicidaires », fait valoir Clara Bonnavion, qui cite l'enquête sur la santé mentale publiée il y a deux ans.
La promesse de supprimer les ECN pour les carabins entrant en deuxième cycle dès 2019 constituait « un véritable espoir ». Le report d'un an est donc une grave désillusion. D'autant que des groupes de travail (enseignants, étudiants, tutelles) se sont concertés pour affiner le futur dispositif, avec un ensemble de propositions sur la table (approche par compétences, refonte des référentiels d’apprentissage, prise en compte du parcours individuel). « Mais peu d’arbitrages et de documents officiels de la part de vos ministères ont conduit à un flou, et à une faible prise en main de la réforme par les doyens et les équipes pédagogiques, se désole Clara Bonnavion. Bien qu’ayant été alertés de nombreuses fois par l’ANEMF, peu de changements ont été effectués par vos ministères dans la conduite de la réforme, nous amenant à la situation actuelle. »
Mission ministérielle doyen/étudiant
Refusant de baisser les bras, la structure jeune réclame des gages pour que ce report ne soit pas une année de perdue. Une mission ministérielle doit « impérativement » être instaurée. Codirigée par un doyen et un étudiant en médecine, elle devra assurer la coordination des acteurs de la réforme « afin d’obtenir une publication rapide des textes, et une déclinaison locale, concrète et coordonnée à travers toutes les facultés de médecine ».
Côté pédagogique, l'ANEMF demande la rédaction « d'un référentiel unique pluridisciplinaire » et le développement en stage de la formation et des nouvelles modalités d'évaluation. Enfin, pour que les carabins « déçus » de ne pas entrer dans un système « plus sain et moins anxiogène » ne soient laissés pour compte, « des améliorations significatives doivent être mises en place pour la dernière promotion devant passer les ECN ».
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