Afin de pouvoir élaborer le troisième projet régional de santé (PRS) 2023-2028, l’observatoire régional de santé (ORS) d’Île-de-France a été missionné par l’ARS pour réaliser un état des lieux de la santé des Franciliens.
Publié cette semaine, ce dernier montre notamment l’impact de la crise sanitaire sur les habitants d’Île-de-France. « L’effet Covid sur l’espérance de vie des Franciliens est spectaculaire », écrit ainsi l’ORS dans un communiqué. Elle a reculé en moyenne de 1,4 an pour les femmes et de 1,8 an chez les hommes en 2020. La pandémie a également creusé les inégalités territoriales. Par exemple l’écart d’espérance de vie chez les hommes entre le département où elle est la plus haute, les Hauts-de-Seine, et là où elle est la plus basse, la Seine-Saint-Denis, est passé de 2,6 ans en 2019 à 3,9 ans en 2020.
Troubles du sommeil préoccupants chez les jeunes
La santé des jeunes et particulièrement la santé mentale est aussi un des points préoccupants de l’état des lieux. On constate une très forte augmentation de la prévalence des épisodes dépressifs caractérisés entre 2017 et 2021, notamment chez les jeunes, les personnes seules ou à faibles revenus. Mais déjà avant la crise sanitaire, le risque de dépression touchait près d’un quart des Franciliens de 17 ans, particulièrement les filles.
L’ORS rapporte aussi un niveau élevé de plaintes somatiques et psychiques chez les collégiens et lycéens. Un stress lié au travail scolaire (30 %), au cyberharcèlement (6 %) ou au harcèlement scolaire (5 %).
Les troubles du sommeil touchent aussi de très nombreux jeunes : 17,8 % des adolescents sont insomniaques, 40 % en restriction de sommeil, 20 % en privation de sommeil.
En dehors des jeunes, pour la première fois les troubles de santé mentale sont identifiés comme première cause de mortalité maternelle. Et face à ces chiffres préoccupants, l’ORS ajoute que « l’offre de soins en santé mentale est particulièrement déficiente, avec des taux d’hospitalisation extra-régionaux importants et une démographie de psychiatres libéraux concentrée dans l’hyper centre ».
Des soins en fin de vie insuffisants
À l’autre bout de la pyramide des âges, l’ORS alerte sur le fait que le vieillissement général de la population doit être davantage anticipé. En 2021, 43 % des Franciliens de plus de 60 ans se perçoivent en mauvais état de santé, 60 % ont des pathologies chroniques, 37 % rapportent des difficultés dans leur quotidien, et 13 % des difficultés sévères.
Un accroissement du nombre de personnes âgées dépendantes est attendu, par exemple + 123 % en Seine-et-Marne en 2040. Il entraînera une augmentation du nombre de personnes atteintes par des maladies neurodégénératives ou des risques de chutes accrues, analyse l'ORS.
Par ailleurs, l’ORS note que la qualité des soins en fin de vie est insuffisante estimant que six Franciliens décédés sur dix auraient eu besoin de soins palliatifs afin de soulager leurs souffrances.
Des inégalités sociales et territoriales aggravées
La région est aussi marquée par des inégalités sociales et territoriales de santé qui se creusent. Elles touchent notamment les principales causes de mortalité et de morbidité : l’obésité, le diabète et les maladies cardio-neurovasculaires et dans une moindre mesure les cancers.
La mortalité prématurée avant 65 ans est elle aussi marquée par de fortes inégalités et varie de -50 % à +34 % selon les cantons franciliens par rapport à la moyenne régionale.
Les situations de très grande précarité sont aussi en augmentation. Ces populations sont très marquées par une forte mortalité prématurée, des pathologies chroniques aggravées, une prévalence de maladies infectieuses importante et une santé mentale fragilisée touchant les plus vulnérables (enfants, femmes et exilés).
La région se caractérise aussi par la présence d’un parc de logements « dégradés, anciens, mal isolés, occupés (voire suroccupés) par des populations souvent socialement et économiquement défavorisées ». La région est donc la plus touchée par les intoxications au plomb, au monoxyde de carbone et la précarité énergétique y est très prégnante.
Mauvaise élève sur la santé périnatale
Parmi les sujets sur lesquels la région se démarque aussi, on note la tuberculose, les IST, le VIH/Sida et le saturnisme infantile. « La région concentre 30 à 40 % des cas de ces pathologies alors qu’elle ne représente que 18 % de la population française », détaille ainsi l’ORS.
Malgré des progrès, la pollution atmosphérique contribue encore aussi à près d’un décès sur dix. Mais entre 2010 et 2019 la mortalité attribuable à l’exposition aux PM2,5 est passée de 10 350 à 6 220 décès annuels, précise l’observatoire.
Enfin, autre sujet sur lequel la région se distingue négativement, la santé périnatale. L’ORS fait notamment état d’une augmentation de la morbidité gravidique. La mortalité infantile est aussi plus élevée qu’ailleurs avec « une tendance inédite à la hausse depuis 2012 environ, particulièrement notable pour la mortalité néonatale précoce ».
Dans un communiqué, l’ARS indique donc que ce diagnostic de l’ORS servira le PRS 2023-2028 et que la santé périnatale, la santé des enfants et des adolescents, la santé mentale et celle des personnes âgées « feront partie des priorités ».
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