Pourquoi réclamez-vous le retour de la prise en charge à 100 % par l'Assurance maladie des téléconsultations réalisées par téléphone ?
Dr Luc Duquesnel : La crise Covid nous a permis de découvrir les bienfaits de la téléconsultation. Nous nous sommes aperçus que la téléconsultation téléphonique répondait à un besoin. Et qu'il n'était forcément nécessaire de faire se déplacer des gens jusqu'à notre cabinet alors que l'on pouvait régler les problèmes en téléconsultation. Aujourd'hui, ce mode de consultation est adapté au renouvellement de traitements de certaines personnes âgées, pour analyser le résultat d'un bilan ou d'un examen complémentaire (radio, scanner...). Toutes ces choses qui ne nécessitent pas un examen clinique, on pourrait très bien les réaliser par téléphone. Les téléconsultations par visioconférence ne sont pas toujours adaptées lorsque nous avons affaire à des patients âgés qui ne savent pas s'approprier les outils ou n'ont pas de smartphone, ou encore pour des personnes qui vivent en zone blanche. Ces patients, on est obligé de les faire revenir au cabinet alors que leur présence n'est pas forcément importante. Cela à une époque où l'on peut avoir en salle d'attente des gens contaminants ou cas Covid.
Comment expliquez-vous que ce mode de consultation ne soit pas autorisé dans ces cas ?
Dr L. D. : La téléconsultation téléphonique est souvent décriée. Pourtant, et je l'ai rappelé au directeur de l'Assurance maladie, la permanence des soins ambulatoires et la régulation médicale reposent sur la téléconsultation. Des millions d'appels sont régulés tous les ans par les médecins libéraux. Les médecins régulateurs à l'hôpital des Samu l'utilisent aussi. Quand on a une douleur thoracique, une suspicion d'infarctus, un AVC, le centre 15 n'a pas la visio. Il prend tous les renseignements, il entend le patient respirer, lui demande quels traitements il prend ou quels sont ses antécédents. La téléconsultation téléphonique amène plein d'informations. Elle ne permet pas de tout faire, on ne palpe pas un ventre par téléphone mais la téléconsultation répond à un réel besoin.
Lors de l'université d'été de la CSMF début septembre, Thomas Fatome avait indiqué étudier avec le ministère de la Santé l'idée de réactiver le « remboursement de la téléconsultation par téléphone ». Comment expliquez-vous cette fin de non-recevoir ?
Dr L. D. : Tout simplement parce qu'ils ont peur des dérives. Comme sur de nombreux sujets, on observe une absence de confiance envers les professionnels de santé libéraux. Il faut bien évidemment cadrer cette activité pour éviter les déviances, il ne s'agit pas d'autoriser des médecins à avoir une activité exclusive au téléphone. Mais à partir du moment où cette consultation téléphonique rend service aux patients et libère du temps médical, on aurait bien tort de s'en priver. La téléconsultation par téléphone nous a été très utile au plus fort de la crise du Covid et le serait encore très clairement aujourd'hui. Le médecin, quand il réalise une téléconsultation, engage sa responsabilité, il ne fait pas n'importe quoi !
Un acte réalisé au téléphone doit-il être réglé au même niveau qu'un acte effectué au cabinet ? Êtes-vous prêt à ouvrir ce débat ?
Dr L. D. : Tout peut être ouvert mais une téléconsultation ne se résume pas à un simple coup de fil. On le voit avec la régulation médicale qui permet de générer des économies quand on n'envoie pas de médecin effecteur. Cela permet de faciliter l'accès aux soins. Sur 100 appels, un effecteur est envoyé dans 25 à 40 cas. Aux autres, on envoie des ordonnances, on donne des conseils... Minimiser le coût de la téléconsultation téléphonique enverrait l'image qu'il suffit de passer un coup de fil pour coter quelque chose.
Que comptez-vous faire pour obtenir satisfaction ?
Dr L. D. : Nous allons revenir à la charge auprès du cabinet du ministère de la Santé et de l'Assurance maladie qui ont du mal à trancher sur ce sujet. Leur attentisme sur la téléconsultation par téléphone est à l'image des négociations conventionnelles mal engagées sur l'avenant 9. C'est à l'image de la téléexpertise de niveau 1 que l'on propose de rémunérer 5 euros aux médecins, ou de la façon dont sont abordés les soins non programmés. On a l'impression que ces sujets ne sont plus la priorité du gouvernement préoccupé uniquement par la crise du Covid.
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