Le rapport sur le financement des soins piloté par le directeur de la Drees Jean-Marc Aubert et remis mardi à Agnès Buzyn, suscite déjà des craintes au sein de la profession. Il préconise une augmentation de la part des forfaits dans la rémunération des médecins et une profonde refonte de la nomenclature. Certains syndicats considèrent comme une menace pour la médecine libérale cette remise en cause du paiement à l'acte.
Rapport de « technocrates » ?
Le syndicat ReAGJIR (remplaçants et jeunes installés) trouve que le rapport Aubert va « dans le sens des jeunes médecins » et que « la diversification de la rémunération du médecin répond à une attente de la profession ». De même, les médecins des centres de santé (FNCS et USMCS) applaudissent les propositions. « Il est enfin possible de reconnaître l'évidence : pour les soins courants, le paiement à l'acte c'est dépassé, place au forfait », clament les syndicats dans un communiqué commun. Selon eux, le développement des forfaits permettra de financer l'éducation aux traitements et aux maladies chroniques, la diététique, le sport-santé... et entraînera une diminution des actes inutiles.
Les syndicats de médecins libéraux seniors sont eux plus réservés. Le président des Généralistes CSMF, le Dr Luc Duquesnel prévient que « le paiement à l'acte doit rester prépondérant dans la rémunération du généraliste » mais salue un rapport « qui rappelle la place prépondérante du généraliste dans le parcours de santé ».
Chez MG France, la vice-présidente Dr Margot Bayart confirme que « les modes de rémunération doivent évoluer. L'ancien président Leicher militait pour une part allant jusqu'à 30 % dans la rémunération des généralistes ». C'est davantage la complexité de ce rapport qui inquiète la généraliste. « Nous demandons de la simplicité. Nous négocions actuellement pour avoir un assistant médical et nous décharger de l'administratif, ce n'est pas pour nous en rajouter avec des forfaits incompréhensibles. »
Le président de la CSMF, le Dr Jean-Paul Ortiz, reste lui aussi « prudent ». Il faudra veiller selon lui à ce que « les indicateurs soient réalisés par les médecins eux-mêmes, dans le cadre de la négociation conventionnelle », prévient-il. Le président de la "Conf" s'inquiète de la mise en place programmée des forfaits à l'épisode de soins. « Qui va les gérer et sur quelles bases de répartition vont être attribués les éléments qui le composent ? », se demande-t-il. Des interrogations partagées par le Dr Christophe L. sur legeneraliste.fr : « La répartition se fera dans quels ratios, par une CPTS ? Quid de l’homéopathe ? Aura-t-il le même forfait que l’allopathe ? Vaste foutoir et guerres internes en perspective », prédit le médecin.
Préserver la liberté de choix du patient
D'autres syndicats sont plus sceptiques encore. Le patron de la FMF, le Dr Jean-Paul Hamon, voit ces annonces comme « un rapport de plus rédigé par des technocrates » et craint que ces nouveaux forfaits « ne viennent encore plus complexifier la tâche du généraliste alors que la priorité est l'accès aux soins ». Le patron de la FMF est rejoint par le Dr Jean-Marie G. sur notre site. « La Drees, qui est l'organisme habilité à établir des rapports sur commande du ministère de la Santé ne pouvait faire autre chose que ce délire administratif… Voulu par le ministère. Encore une vaste farce ! », commente-t-il.
Pas plus d'enthousiasme au SML du Dr Philippe Vermesch qui dénonce « une entreprise de destruction massive de l'exercice libéral ». Le syndicat alerte sur les dangers de ces nouveaux modes de rémunération qui « risquent de pousser les médecins à moins voir les patients et à écarter les moins " rentables " d’entre eux qui sont aussi les plus complexes ».
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