2 750 euros par patient, c’est le montant moyen des dépenses de santé en France par patient en 2018 d’après une nouvelle étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), publiée ce 5 mai.
Selon ce travail, les dépenses de santé par habitant varient fortement d’un département à l’autre.
Ainsi, elles sont inférieures à 2 480 euros par patient dans les 10 % des départements où elles sont les plus faibles, mais sont supérieures à 3 160 euros dans les 10 % des départements où elles sont les plus élevées.
C’est en Loire-Atlantique que la dépense moyenne est la plus basse (2 290 euros) et en Haute-Corse qu’elle est la plus haute (3 550 euros).
« La dépense moyenne par patient est supérieure à la moyenne nationale en Corse (Haute-Corse et Corse-du-Sud, respectivement +29 % et +27 %), dans plusieurs départements ruraux du centre (Cantal et Creuse en tête, respectivement +21 % et +19 %) et du nord-est de la France métropolitaine (Meuse, Haute Marne, Haute-Saône), ainsi qu’en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), en Martinique et en Guadeloupe », note les auteurs.
Selon l’étude, ces écarts sont liés principalement aux différences démographiques d’âge et de sexe des départements. « Ainsi, dans les départements ruraux du centre de la France métropolitaine, du Cantal et de la Creuse, qui présentent des dépenses de santé par patient particulièrement élevées et une moyenne d’âge parmi les plus élevées du pays, les dépenses de santé, une fois standardisées, s’avèrent proches de la moyenne nationale (…) Leur structure démographique apparaît donc comme le principal facteur d’explication du surcroît de dépenses par rapport aux autres départements », expliquent les auteurs.
Taux de précarité et niveau de vie
Malgré tout, une fois neutralisés les écarts liés aux différences démographiques, des disparités restent.
Ainsi, les dépenses standardisées sont plus basses que la moyenne dans tout le quart nord-ouest de la France métropolitaine (-17 % en Vendée, -16 % en Charente, dans la Sarthe et dans les Deux-Sèvres) et dans le quart sud-ouest (-12 % dans le Lot et dans le Lot-et-Garonne), le Centre (-11 % dans le Loir-et-Cher) et dans les Alpes (-11 % en Haute-Savoie).
À l’inverse, elles sont particulièrement élevées dans les départements d’outre-mer (+25 % à La Réunion), en Corse (+19 %), dans le quart nord-est métropolitain (+11 % dans le Nord et +10 % dans le Bas-Rhin) et le pourtour méditerranéen (+16 % dans les Bouches-du-Rhône).
Le fait qu’il existe une modulation géographique sur les tarifs qui s’appliquent aux séjours hospitaliers ou sur les soins de ville dans les DOM est un premier facteur explicatif.
Mais ces écarts persistants sont aussi dûs aux caractéristiques socio-économiques de la population. Ainsi comme l’explique la Drees, les dépenses de santé sont un peu plus élevées dans les départements où le taux de pauvreté est le plus important.
La Seine-Saint-Denis, qui présente le plus fort taux de pauvreté en France métropolitaine en 2018 (28,4 %), a ainsi un niveau de dépenses plus élevé que la moyenne (+6 %). A contrario, le faible taux de pauvreté observé en Haute-Savoie (8,9 %) explique en partie la faiblesse des dépenses standardisées dans ce département (-11 %).
« De manière générale, la précarité entraîne des besoins accrus en soins et biens médicaux en raison d’un état de santé en moyenne plus dégradé, ce qui se traduit par des dépenses sensiblement plus importantes », explique la Drees.
Les dépenses sont aussi plus importantes dans les départements où le niveau de vie des plus aisés est le plus élevé, à taux de pauvreté et densité d’offre locale donnés.
« Un niveau de vie plus important peut en effet permettre de diminuer le renoncement aux soins, voire d’augmenter la propension à payer pour de meilleurs délais ou un choix plus sélectif de professionnels, via des dépassements d’honoraires », détaille les auteurs.
L’étude avance plusieurs hypothèses : le fait que les professionnels sont susceptibles de fixer des tarifs plus élevés là où les patients ont une plus grande capacité à payer, ou le fait qu’ils « récupèrent » par des dépassements d’honoraires les surcoûts de la vie et de l’immobilier qui existent dans les zones où les patients sont plus aisés.
Enfin les disparités dans les dépenses peut aussi s’expliquer par l’offre de soins et la densité médicale.
« Une offre de soins relativement faible peut mener à une diminution du recours aux professionnels et, probablement, à une dépense moyenne par habitant moins importante », souligne l’étude.
Elle montre ainsi que dans certains départements du pourtour méditerranéen (Hérault, Alpes-Maritimes, Var), la densité médicale élevée est liée à un niveau important de dépenses standardisées. Au contraire, une offre de soins moins dense va de pair avec un niveau plus faible de dépenses standardisées, comme dans certains départements de l’ouest de la France métropolitaine (Sarthe, Tarn, Ille-et-Vilaine, Manche).
« L’influence de la densité de l’offre de soins passe aussi par les prix. En effet, quand la concurrence s’accroît, les dépassements d’honoraires diminuent », ajoutent les auteurs.
Des dépassements d'honoraires qui impactent le reste à charge
L’étude de la Drees renseigne aussi sur le reste à charge après assurance maladie obligatoire (RAC AMO).
En 2018, l’assurance maladie obligatoire prenait en charge en moyenne 82% des dépenses de santé en France, et le RAC AMO s’élèvait en moyenne à 490 euros par patient.
Les disparités territoriales de dépenses existent mais elles ne sont pas aussi importantes sur les restes à charge, la prise en charge par l’assurance maladie permettant de les atténuer. Malgré tout, dans les 10 départements où ils sont les plus élevés, les RAC AMO sont supérieurs d’au moins 19 % aux RAC AMO moyens des 10 départements où ils sont les plus faibles (cet écart est de 27 % pour les dépenses).
Parmi les départements présentant des RAC AMO nettement supérieurs à la moyenne nationale, on trouve une partie de ceux d’Île-de-France (+30 % pour Paris et les Hauts-de-Seine, +16 % pour les Yvelines), de Paca (Alpes-Maritimes à +21 %, Var à +11 %) et d’Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône à +13 %, Isère à +12 %).
Le principal facteur de variation des RAC AMO est le montant des dépassements d’honoraires. Ainsi, le RAC AMO est composé, au niveau individuel, de près de 40 % de dépassements à Paris, dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines, et de plus de 30 % dans l’Essonne, la Seine-et-Marne, le Val-de-Marne et le Val-d’Oise. Les départements du Rhône et de l’Isère présentent eux aussi une part importante de dépassements (entre 30 % et 35 % au sein du RAC AMO).
« Ce sont les dépassements chez les médecins spécialistes, dans les cliniques et le dentaire qui dévient le plus des moyennes nationales », analysent les auteurs.
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