La médecin généraliste, victime d’une violente agression le 12 août dans son cabinet médical situé dans les quartiers Nord de Marseille, a obtenu justice. « Nos demandes ont été satisfaites », a déclaré son avocat, Me Mokhtar Abdennouri, ce jeudi 3 octobre, à l’issue du procès.
La jeune femme de 20 ans, poursuivie pour « violences ayant entraîné une ITT inférieure à huit jours commises en réunion et sur un professionnel de santé », avait été placée en détention provisoire, il y a un mois. Elle a été condamnée par le tribunal correctionnel de Marseille à une peine de deux ans d’emprisonnement, dont la moitié en détention à domicile sous surveillance électronique, le reste en sursis probatoire avec obligation de soins, de travail et d’indemnisation, suivant les réquisitions du parquet.
« Un signal, il était temps »
L’agresseur a donc été reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés, et qu’elle conteste. « Le tribunal a su entendre la situation et la détresse dans laquelle se trouve cette jeune demoiselle et rendre une sanction qui soit adaptée à sa personnalité problématique », a déclaré son avocat, Me Karim Bouguessa. À l’ouverture du procès, la jeune femme de 20 ans avait informé le tribunal qu’elle était enceinte de sept semaines, une grossesse qu’elle a appris en détention. Elle doit sortir de prison le jour même.
Le tribunal a, en revanche, jugé irrecevable la constitution de parties civiles du Conseil départemental de l’Ordre des médecins et du Dr Saïd Ouichou, avec qui la généraliste avait signé un contrat de collaboration. Un rejet que ne comprend pas leur avocat Me Bruno Lefebure. « Cela n’a pas été expliqué. Je vais attendre le jugement pour analyser ce rejet », a réagi le conseil, qui reconnaît que « cette condamnation envoie un signal. Il était temps ! »
Torrent médiatique
L’agression de la généraliste avait provoqué un très vif émoi dans la cité phocéenne, et même eu un écho national. « De cette audience, on veut faire une tribune », a lancé Me Bouguessa, qui a dénoncé « un torrent médiatique » tout en déplorant les violences contre les médecins.
Quelques minutes plus tôt, le procureur avait brandi à l’adresse du tribunal un graphique représentant les statistiques de déclarations de violences, selon l’observatoire de l’Ordre : 1 244 signalements en 2022, en hausse de 23 % en un an, « ce qui est effrayant », a-t-il commenté. Des chiffres alarmants, scandés également par Me Lefebure, qui représente l’Ordre départemental des médecins, selon lequel « une agression de médecin a lieu tous les trois jours dans les Bouches-du-Rhône ».
La docteure a reçu un petit passage à tabac
Le procureur
Au sujet des violences dont a été victime la généraliste, et que confirment les constatations du médecin légiste, le procureur a même déclaré que « la docteure a reçu un petit passage à tabac ». Les nombreuses traces de griffures, de morsures, d’ecchymoses et d’hématomes ont été énumérées par la présidente du tribunal.
Âgée de 35 ans, la médecin, qui avait déposé plainte deux jours après l’agression, a expliqué avoir été frappée au visage, tirée par les cheveux, mordue dans le dos et avoir reçu des coups de poing pour ne pas avoir délivré une ordonnance. Aujourd’hui, assise sur le banc des parties civiles, elle n’a pas dit un mot de toute l’audience, ne souhaitant pas prendre la parole.
« Depuis la survenue des faits, ma cliente ne travaille plus. Elle a mis fin à son contrat de collaboration et elle ne veut plus exercer à Marseille, elle envisage d’aller dans un autre département », a expliqué son avocat. Me Mokhtar Abdennouri a pointé du doigt au passage « les discordances de versions » entre les parties.
Retranscription des appels téléphoniques
Pour rappel, la médecin avait été rouée de coups après son refus de délivrer une ordonnance pour une personne qui n’était pas présente au cabinet. « Ma cliente est soumise à des obligations et à une déontologie », a martelé Me Abdennouri, s’agissant de cette demande de prescription d’une prise de sang pour la belle-mère, alors enceinte de huit mois. « Elle ne peut pas prescrire n’importe quoi à une patiente qui n’est pas là et qui a du mal à s’exprimer. S’il y a des complications, elle va devoir les assumer », a poursuivi l’avocat de la généraliste. « Ma cliente avait parfaitement le droit de ne pas délivrer cette ordonnance », a-t-il renchéri, s’appuyant sur la retranscription des appels téléphoniques de la généraliste à la police.
En plus des trois jours d’ITT, la victime dispose d’un certificat d’arrêt de travail de 30 jours, délivré par un psychiatre. Une expertise a été ordonnée afin de déterminer les séquelles, notamment d’ordre psychiatrique, de la médecin agressée en vue d’évaluer l’indemnisation à laquelle elle pourra prétendre.
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