La réforme des retraites pilotée par Jean-Paul Delevoye constitue-t-elle une menace pour les médecins libéraux ? C'est la grande crainte de l'Union française pour une médecine libre - syndicat (UFML-S).
Pour alerter la profession sur les conséquences de la mise en place d'un nouveau régime de retraite universel amené à remplacer les 42 régimes actuels, le président de l'UFML-S, le Dr Jérôme Marty, et l'économiste Frédéric Bizard, ont présenté ce mardi une analyse de l'impact de la réforme programmée sur la retraite des médecins.
Disparition de la Carmf
Les conclusions de ce rapport sont formelles. « La mise en place d’une réforme systémique est nécessaire pour le pays mais ne peut se traduire par un régime unique étatique supprimant toute solidarité professionnelle », affirme Frédéric Bizard. Selon le Dr Marty, la réforme, telle qu'elle est programmée comporte « divers dangers » pour les médecins libéraux. Le futur régime universel voulu par le gouvernement reposerait sur un système par répartition et par points, avec un âge légal à 62 ans, et inclurait tous les cotisants jusqu’à 3 fois le plafond de la Sécurité sociale, soit environ 120 000 euros. « Nous ne sommes pas contre l'instauration d’un régime de base universel, mais nous ne voulons pas des trois plafonds annuels de Sécurité sociale ni de la disparition de nos régimes complémentaires », plaide le généraliste de Fronton.
Ce scénario engloberait environ 65 % des médecins et signerait la fin de la Carmf. La caisse des médecins avait de son côté déjà fait l'objet d'une réforme « en temps choisi » en janvier 2017, instaurant un système de surcote à partir de 65 ans.
Augmentation des cotisations
Les spécificités de carrière des médecins libéraux doivent donc continuer à être prises en compte pour le calcul de la retraite, estime Frédéric Bizard dans le rapport de 80 pages qu'il a rendu. L'UFML redoute une augmentation des cotisations des médecins qui cotisent aujourd'hui moins que les salariés (effort contributif de 20 % contre 28 % pour les salariés). Ceci s'explique par le fait que les médecins financent l'intégralité de leurs cotisations (sauf la part ASV prise en charge par l'Assurance maladie) alors que celles d'un salarié sont financées de moitié par l'employeur.
Deuxième interrogation soulevée par le syndicat, le devenir de la réserve de la Carmf, qui s'élève aujourd'hui à 7 milliards d'euros. Cette enveloppe, constituée pour répondre au vieillissement démographique, pourrait être aspirée par l'État à l'occasion de la réforme, conséquence de la disparition de la Carmf. « Les médecins et uniquement les médecins ont constitué cette réserve. Aujourd’hui cet argent leur appartient pour financer demain leurs retraites », martèle l'économiste Frédéric Bizard. La réserve de la Carmf est en effet plus conséquente que la réserve de l'Agirc-Arrco. La caisse des médecins dispose de 18 fois plus de réserves par cotisant que l’Agirc-Arrco : 55 000 euros de réserve par cotisant chez les médecins contre 3 000 euros pour les autres. Le problème de la gouvernance est aussi évoqué par l'économiste, qui dénonce « un grand flou » autour du pilotage du nouveau système.
Sensibiliser les médecins
L'UFML-S va entamer un tour de France pour sensibiliser ses sympathisants aux conséquences de cette réforme. Les médecins se retrouvent en effet bien souvent démunis face à la complexité de leur système de retraite et le syndicat souhaite effectuer un travail de pédagogie auprès d'eux. Les troupes du Dr Marty militeront dans le même temps pour la conservation d'un régime complémentaire spécifique pour les médecins libéraux auprès du gouvernement. « Nous allons écrire à la ministre de la Santé pour lui donner notre point de vue », a annoncé le Dr Jérôme Marty. Le temps est compté pour les médecins car le gouvernement veut présenter sa réforme des retraites d'ici l'été.
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