2022 marquera « un tournant pour la médecine libérale », veut croire le Dr Jean-Paul Ortiz. Alors que la profession est « au bord de la rupture » et que le système de santé semble « à l'agonie car en surcharge depuis près de deux ans », le président de la CSMF – qui ne se représentera pas à sa succession en mars – a dévoilé ce jeudi, lors de ses vœux à la presse, une dizaine de propositions pour favoriser l'accès aux soins « partout et pour tous », principal enjeu de la présidentielle à ses yeux. Et pas question pour les médecins de se voir « imposer de mauvaises solutions inefficaces », avertit le néphrologue.
Pestant contre la vision hospitalo-centrée du gouvernement, la CSMF prône d'abord une formation « ouverte sur l'exercice libéral ». Des stages à l'extérieur de l'hôpital doivent être « obligatoirement » organisés dès le deuxième cycle et le troisième cycle doit être le temps « d’un exercice partagé entre les structures hospitalières publiques, les cliniques privées et les cabinets de ville ».
Exercice multisite avec honoraires majorés de 30 % en zone sous-dense
À l'heure où l'exercice libéral est concurrencé par les multiples offres de salariat, l’installation dans les zones sous denses doit être encore plus favorisée par des aides, notamment des collectivités, « en fonction des besoins territoriaux ». Le système d’incitations doit être simplifié et regroupé, recommande la Conf'.
Autre priorité assumée par la CSMF : favoriser l'exercice regroupé. « Il faut favoriser l'émergence des équipes de soins primaires, de soins spécialisés », plaide le Dr Ortiz, attendant que la Cnam « se décide enfin à les financer ». Le regroupement professionnel doit être possible « sous toutes ses formes (cabinet de groupe, centre médical, MSP, cabinet multi spécialistes) et sans modèle unique ». Quant à l’exercice multisite, il doit être favorisé « en défrayant les médecins » qui vont exercer à plusieurs kilomètres de leur cabinet principal. Dans ce cadre, les honoraires doivent être majorés de « 30 % dans les zones sous denses ».
Valoriser l'expertise médicale
Côté environnement professionnel, à l’instar d'autres syndicats, la CSMF entend décharger le médecin libéral des tâches non médicales. « Il faut assouplir le système des assistants médicaux et aller vers un assistant médical par médecin ; ceci devrait être immédiatement fait dans les zones sous denses, sans conditions », estime le Dr Jean-Paul Ortiz.
Il se prononce en faveur des infirmières en pratique avancée (IPA) « sous responsabilité des médecins, mais ayant une autonomie après orientation par le médecin dans le cadre d’un parcours de soins coordonné et protocolisé ». Une vision plus cadrée que celle de l'Igas dans son récent rapport.
Sur le fond, la centrale polycatégorielle défend plus que jamais la valorisation de l'expertise de la consultation médicale. « Faire bouger les contours des métiers des autres professionnels de santé (IPA, kinés, orthophonistes) ne peut s’envisager qu’avec une valorisation du médecin recentré sur son expertise. Les consultations devenues plus longues doivent être hiérarchisées et revalorisées car elles seront moins nombreuses », plaide le Dr Ortiz qui défend de longue date une nouvelle grille des actes cliniques.
La CSMF souhaite soutenir le cumul emploi retraite avec des « avantages considérables » comme la défiscalisation, un allégement des charges ou une suppression des cotisations retraite afin de maintenir en activité les médecins retraités.
Le défi de la convention
L'autre « grand défi » des prochains mois sera la préparation de la future convention médicale (l'actuelle prendra fin en mars 2023). Les négociations commenceront en septembre prochain mais la Cnam a déjà prévu des réunions préparatoires par groupes de travail de mars à juin 2022. Cette convention devra « valoriser l'expertise médicale et l’innovation », y compris en simplifiant la cotation des actes de consultation autour de quatre niveaux lisibles, une requête ancienne de la CSMF.
Enfin, 2022 sera synonyme de changements importants au sein de la maison confédérale qui a entrepris une profonde rénovation depuis plusieurs mois. Cette mue est orientée vers un syndicalisme de « services ». Des travaux sont également en cours dans les locaux parisiens avec la création d’un amphithéâtre, de salles de formation et l'installation du cabinet témoin – le cabinet 2030 – fer de lance de cette rénovation à la fois sur le fond et sur la forme.
Le nouveau conseil national se réunira pour la première fois en mars prochain et élira son nouveau président. Le Dr Ortiz a annoncé officiellement ce jeudi qu'il ne se présenterait pas à sa succession après huit années de mandat mais le néphrologue restera « actif dans le monde de la santé ».
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