Certificats de « non-éviction », d’« aptitude à la reprise du travail », de « non-inaptitude » ou, au contraire, d’inaptitude ! Telles sont les demandes qui fleurissent dans les cabinets de médecins généralistes depuis le déconfinement progressif à partir du 11 mai. Ces derniers jours, les demandes souvent infondées de certains employeurs ou de l’Éducation nationale s’ajoutent à celles formulées par les salariés…
Dans le Gard, ces sollicitations ont pris de telles proportions que le président départemental de l’Ordre, le Dr Frédéric Jean, lui-même généraliste, a adressé un e-mail en forme de piqûre de rappel à l’ensemble de ses confrères. « En ces temps de déconfinement, de nombreuses demandes de certificats médicaux abusifs se font jour, écrit-il. Je vous rappelle qu’aucun texte réglementaire ne rend nécessaire un certificat d’aptitude pour une reprise de travail, ou de scolarité, et ce quelle que soit la pathologie en dehors des cas habituellement prévus par la loi : accident du travail, reprise scolaire après maladie contagieuse énumérée dans un arrêté interministériel du 3 mai 1989*. En particulier (ce certificat) n’est pas nécessaire après un arrêt de travail en rapport avec le Covid-19 (maladie, contact, éviction pour comorbidité), ni scolaire en raison de l’existence d’un projet d’accueil individualisé (PAI). »
L'affaire prend une telle ampleur que, ce mardi, l'Ordre national des médecins (CNOM) a lui aussi procédé à une mise au point sur les certificats de reprise du travail. L'institution rappelle « aux médecins, aux salariés et à leurs employeurs » qu'un arrêt de travail arrivant à terme entraîne la reprise « de manière automatique » dès le lendemain du dernier jour de l'arrêt.
Le médecin traitant n'a pas à intervenir dans cette reprise, sauf pour les cas précités (accident du travail, maladie professionnelle) « où il établit un certificat médical de reprise AT ou MP, que cette reprise de travail soit à temps complet ou allégé pour raison médicale ». Encore une fois, la réclamation de certificat de reprise « ne repose sur aucun texte » et donc un salarié ne peut se voir empêché de travailler, au terme de son arrêt, pour non production d'un tel certificat, recadre l'Ordre. « Les mêmes observations sont valables pour des certificats de non-contagiosité parfois réclamés sans fondement légal ni justification médicale par des employeurs », insiste le CNOM.
Pour le reste, seul le médecin du travail est habilité à intervenir dans la reprise des salariés, suivant les procédures du code du travail (ou la réglementation relative à l'état d'urgence sanitaire).
Réassurance
Les abus, fréquents en tout début de déconfinement, demeurent d’actualité. « Encore ce matin (lundi 25 mai, NDLR), on est venu me voir pour un certificat d’aptitude réclamé par un employeur, s'agace le Dr Jean-Christophe Calmes, généraliste dans l’Hérault et chargé de la communication du syndicat MG France. On nous demande aussi beaucoup de prescrire des tests PCR… Ce qui ne sert à rien dans les situations qui se sont présentées. »
En dehors des demandes des employeurs ou de l’Éducation nationale, le Dr Calmes affirme rencontrer beaucoup de patients atteints d’angoisse à l'instar de cette vendeuse de chaussures très inquiète parce que ses clients ne respectent pas les gestes barrières et touchent la marchandise. « Nous sommes beaucoup dans la réassurance. Il peut arriver que le patient se trouve dans un état phobique. Dans ce cas, la prescription d’un arrêt peut se justifier mais elle sera basée sur des critères médicaux », détaille-t-il avant de glisser que les personnes venant en consultation pour demander un arrêt de travail abusif n’ont pas attendu le 11 mai pour tenter leur chance...
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