Plus d'un médecin généraliste libéral sur deux (54 %) souhaiterait être mieux formé à la prise en charge des patients en situation de vulnérabilité sociale, selon une étude de la DREES (direction des statistiques des ministères sociaux), publiée ce mardi et réalisée avec les URPS de médecins libéraux*.
Les principaux « champs » dans lesquels ces médecins généralistes se sentent le moins bien formés sont les possibilités d’intervention des travailleurs sociaux (82 %) et l’accès aux droits dans le système français (79 %). Ce ressenti des généralistes varie selon la fréquence à laquelle ils sont confrontés à cette vulnérabilité sociale, soulignent les auteurs de l'étude (56 % des généralistes les moins concernés considèrent avoir besoin de formation,contre 46 % des plus concernés).
Consultation plus longue
La prise en charge de ces patients vulnérables est en tout cas jugée plus « difficile » par les trois quarts des omnipraticiens, indique l'étude. Parmi les difficultés signalées, 83 % des médecins interrogés signalent une durée de consultation plus longue avec ces patients, 86 % l'addition de plusieurs problèmes de santé, 84 % une difficulté à suivre le traitement et 83 % un recours aux soins tardif.
Pour ce qui ne relève pas de la clinique, sont pointés du doigt le manque de coordination avec le secteur social (78 %), les obstacles à la prévention envers les patients (75 %) et la surcharge de travail administratif (73 %).
Les médecins ont été questionnés sur la part de leur propre patientèle qu’ils estiment en situation de vulnérabilité sociale (volontairement non définie afin d’identifier leurs représentations). Un praticien sur cinq évalue cette proportion de patients vulnérables à plus de 10 %. Les médecins femmes sont plus souvent dans ce cas de figure, tout comme les jeunes médecins, ceux réalisant le plus d’actes et ceux exerçant à Paris.
Repérage, délais de paiement
Sur les sept critères de vulnérabilité sociale proposés, trois sont majoritairement relevés par les praticiens : les revenus insuffisants pour satisfaire les besoins primaires ou ceux du ménage (67 %), un isolement social (61 %) et des difficultés liées à l’emploi (57 %). « Le repérage de la vulnérabilité sociale semble donc reposer avant tout sur des critères économiques », analyse l'étude.
Dans ce contexte, 55 % des médecins généralistes interrogés estiment que le fait d'accorder des aménagements financiers – délais de paiement ou absence de dépassements d'honoraires – peut aider ces patients vulnérables. Et concrètement, 80 % des répondants indiquent à cet égard avoir accordé « souvent » ou « parfois » de tels aménagements financiers au cours du dernier mois à certains patients. Globalement, ils sont 88 % à estimer que leur rôle est aussi d’adapter leur relation avec un patient en situation de vulnérabilité sociale.
Un cas clinique a été présenté aux médecins pour mieux identifier la façon dont s'adapte leur prise en charge : un diabète chez une femme de 40 ans, obèse non morbide, avec trois critères de vulnérabilité sociale (chômage de longue durée, isolement, non-maîtrise du français). Le cumul des trois difficultés testées incite le médecin à initier un traitement médicamenteux dans 29 % des cas (contre 21 % sans ces difficultés), en complément de conseils sur l’alimentation ou l’activité physique (massivement mentionnés). En revanche, les médecins ne renforcent pas particulièrement le suivi de ces patientes vulnérables alors même qu'ils évoquent des difficultés d’observance et l’inefficacité de la prévention (75 %).
* L'étude a été réalisée à partir des réponses de 994 médecins généralistes libéraux formant un échantillon représentatif, interrogés entre mars et mai 2017.
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