Le caducée permet-il encore aux médecins de s'exonérer de payer pour le stationnement de leur véhicule ?
La question se pose aujourd'hui partout, à Paris et ailleurs. Dans le passé, une circulaire ministérielle de 1995 permettait aux praticiens de s'émanciper de l'horodateur.
Cette circulaire précisait que les véhicules des médecins arborant le caducée pouvaient« bénéficier de mesures de tolérance en matière de stationnement irrégulier dès lors que leurs propriétaires sont appelés à exercer leurs activités professionnelles au domicile de leurs patients ». Les agents verbalisateurs épargnaient souvent les véhicules arborant le précieux sésame.
Mais un peu partout en France, les témoignages abondent de généralistes qui ont été verbalisés alors qu'ils effectuaient une visite à domicile. Le problème est qu'aucun texte ne garantit aux médecins une impunité en matière de stationnement, même en cas d’urgence médicale. La circulaire ministérielle ne parle que de « tolérance ». Tout est donc affaire d'appréciation.
De nouvelles cartes et un tarif préférentiel
Depuis plusieurs mois, les municipalités développent des alternatives, comme des cartes de professionnels ouvrant droit à des réductions de tarifs. Paris propose une carte de « professionnel mobile » qui permet, pour un prix annuel de 240 euros, de bénéficier d'un tarif d'horodateur préférentiel de 0,50 euro de l'heure. Tout médecin, qu'il effectue ou non des visites à domicile, peut s'en procurer une.
La capitale va en outre reprendre la main sur le stationnement sur son territoire à la faveur de l'adoption définitive aujourd’hui même du projet de loi « relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain ». Le texte donne notamment à la ville les pouvoirs auparavant dévolus à la préfecture en matière de verbalisation.
Plus généralement, les mairies ont tendance à ne plus accorder de privilège au caducée. Ce dernier pèse aujourd'hui bien peu dans la balance. Si bien que partout en France, la note du stationnement commence à être salée. À Clermont-Ferrand, la mairie a inauguré le « liberty pass », un onéreux sésame (1 250 euros par an) permettant à tout un chacun de ne pas être verbalisé pendant un an sur les places régulières. Face au tollé, la mairie a un peu reculé, se contentant d'indiquer que les agents continueraient à faire preuve de mansuétude à l’égard des médecins en visite ou appelés en urgence, « dès lors que le stationnement n’est pas gênant », mais qu'ils n’hésiteraient pas à sanctionner les abus. Tout reste donc subordonné au bon vouloir des agents.
« Laissez-nous travailler »
À Lille, la ville a baissé de moitié le prix accordé aux médecins pour une carte de stationnement, qui passe de 750 à 300 euros par an. Encore trop pour le Dr Bertrand Legrand, qui a lancé une pétition pour obtenir la gratuité. Selon lui, « les médecins sont dans le collimateur des polices municipales ».
À Rouen enfin, le Dr François Hauchecorne a été récemment verbalisé deux fois en une semaine alors qu'il se rendait en visite et arborait son caducée. Comme beaucoup de ses confrères, il menace de cesser les visites à domicile si sa mission de service public n'est plus prise en compte. En Seine-Maritime, à Pau, Lyon, Limoges, Troyes, Poissy et Bordeaux, la CSMF et l'UFML pointent des dysfonctionnements semblables. « Laissez vos médecins travailler, laissez-les stationner », lance la CSMF aux maires de France.
Selon un sondage en ligne réalisé par « lequotidiendumedecin.fr », 72,7 % des 426 praticiens ayant répondu avaient déjà été verbalisés pour stationnement illicite dans le cadre d'une visite. Mais face à l'indigestion de prunes, les praticiens en colère ne veulent plus être bonnes poires.
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