Quelle part de la population française vit aujourd'hui dans ce qu'il est convenu d'appeler un « désert médical » ? Un peu plus de 30 % comme on pouvait le lire en mars dernier dans un rapport sénatorial sur l'accès aux soins ? Ou plutôt 87 % chiffre régulièrement cité par Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale, considérant l'accès aux médecins généralistes ? L'Assurance-maladie se fonde pour sa part – notamment pour ses dispositifs d'aide à l'installation – sur un indicateur composite, l'accessibilité potentielle localisée (APL) pour lequel le ministre de la Santé vient de publier les bases de données actualisées pour l'année 2021.
Ainsi, selon la Drees, son service des statistiques, « l’accessibilité aux médecins généralistes (mesurée par l'APL) se dégrade entre 2019 et 2021, à un rythme un peu plus modéré que celui observé les années précédentes ». Concrètement, les 10 % de la population vivant dans les territoires les mieux dotés en médecine générale ont accès en moyenne à « 5,7 consultations par an » tandis que les 10 % qui habitent dans les zones les plus « désertiques » accèdent en moyenne à « 1,5 consultation par an » seulement. « Les seconds ont ainsi une accessibilité 3,7 fois plus faible que les premiers, souligne la Drees. Ce rapport augmente de 8 % depuis 2019. Ces inégalités s’accentuent donc, dans la poursuite de la tendance observée les années précédentes. » La moyenne nationale se situe à 3,4 consultations par an et par habitant et visites par habitant, versus 3,5 en 2019 et 3,7 en 2016.
Accessibilité potentielle localisée aux généralistes libéraux ou exerçant en centre de santé en 2021
Unité : nombre de consultations accessibles par an et par habitant
Comparaison entre professions
Cet indicateur APL est utilisé par la Drees depuis 2015 pour mesurer plus finement que par la simple densité de professionnels l'accès aux soins médicaux (généralistes de plus et de moins de 40 ans, ophtalmologues, gynécologues, pédiatres et psychiatres) ainsi que ceux des infirmières, sages-femmes, chirurgiens-dentistes, kinés et pharmaciens. « Calculé au niveau de la commune, il tient compte de l’offre et de la demande issues des communes environnantes, de façon décroissante avec la distance, précise la Drees. Il intègre en outre une estimation du niveau d’activité des professionnels en exercice, sur la base des observations passées, ainsi que des besoins relatifs de soins de la population locale, sur la base des consommations de soins moyennes observées par tranche d’âge. » Ces données sont agrégées à un niveau géographique plus large.
Cet indicateur a également la vertu de permettre des comparaisons entre les professions de santé. Les dernières données mettent par exemple en lumière une amélioration marquée de l'accessibilité des sages-femmes : +11 % entre 2019 et 2021 après +16 % entre 2016 et 2019.
Mais l'étude montre aussi que, pour les professions hors médecins (sages-femmes, infirmières et kinés), les inégalités de répartition entre les zones où l'accessibilité aux soins est la meilleure et celles où elle est la plus faible sont plus marquées que pour les généralistes. Ainsi, l’écart entre l’accessibilité des 10 % de la population les mieux et les moins bien dotés est de 5,4 pour les sages-femmes, 6,1 pour les infirmières et même 6,7 pour les kinés.
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