La future loi santé contient-elle les germes d’une nouvelle division syndicale ? Le texte, à ce jour non définitif, prévoit l’extension du médecin traitant à l’enfant (de zéro à seize ans). Cette mesure symbolique est diversement appréciée par les organisations représentatives.
Les généralistes de MG France applaudissent cette disposition qu’ils réclament depuis plusieurs années. Ils demandent l’extension du forfait spécifique de médecin traitant de 5 euros et par an. « 80 % des enfants sont exclusivement suivis par les médecins généralistes », rappelait récemment son président, le Dr Claude Leicher (« le Quotidien » du 19 mai). Sans surprise, les pédiatres sont vent debout contre cette disposition et organisent la riposte. Ils craignent la désaffection de leurs cabinets si les parents venaient à choisir un généraliste comme médecin traitant de leur enfant. Les pédiatres font partie des spécialités qui disposent d’un accès direct. Les enfants de moins de 16 ans sont exemptés du parcours de soins instauré par la loi du 13 août 2004. « Les parents doivent garder le libre choix de consulter un pédiatre ou un médecin généraliste (sans pénalités financières, NDLR), en fonction des besoins de leur enfant et des disponibilités des professionnels de proximité », clame le Conseil national professionnel de pédiatrie, qui réunit pédiatres hospitaliers et libéraux, et qui invite les Français à témoigner leur soutien sur le site jaimemonpediatre.com, créé pour l’occasion.
Un coup porté à la pédiatrie ?
Le Dr Francis Rubel, président du Syndicat national des pédiatres français (SNPF) rappelle que sa spécialité remonte la pente démographique. Plus de 1 500 nouveaux internes sont attendus entre 2013 et 2017 pour une population de 7 000 pédiatres en exercice (dont près de 4 500 en exercice salarié et 1 750 en libéral). « Nous serons en capacité de vraiment suivre les enfants jusqu’à 6 ans, comme cela se fait dans toute l’Europe. Or, la mesure annoncée aboutira à une captation de patientèle par les généralistes », redoute le Dr Rubel.Le tout, rappelle-t-il, alors que la pédiatrie est déjà une des spécialités aux revenus les plus bas (66 500 euros pour un pédiatre libéral en 2012, selon la CARPF). Pour le SNPF, « la France est déjà à la traîne de l’Europe en termes de recours au pédiatre, si ce projet aboutissait, elle serait une exception ».
Même tonalité au SML, où on met en avant le principe du libre choix du patient. Son président, le Dr Roger Rua, rappelle que la prise en charge en premier recours de l’enfant n’est pas l’apanage des seuls généralistes ou pédiatres, mais de toutes les spécialités. « Non au parcours de soins contraint », conclut le syndicat.
L’embarras de la CSMF
À la FMF, le Dr Jean-Paul Hamon se veut pragmatique. Pour lui, les pédiatres « ont tort » de s’opposer à la mesure. Soit les parents les choisissent comme médecin traitant et ils touchent le forfait qui y est attaché, soit c’est le généraliste qui est choisi, et dans ce cas, et les pédiatres pourront coter « C 2 » chaque fois qu’un enfant leur sera adressé pour un avis de consultant, analyse-t-il.
Le médecin traitant pour tous met la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) dans l’embarras. « On ne peut nier que les pédiatres comme les généralistes jouent un rôle important dans la prise en charge de l’enfant, commence le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la confédération. Il est difficile de se prononcer aujourd’hui car on ne sait pas exactement ce qui sera proposé dans le projet de loi. » Le syndicat mène actuellement une réflexion conjointe avec les deux spécialités, et réfléchit à un parcours de soins spécifique aux jeunes enfants qui donnerait aux généralistes et aux pédiatres un rôle à jouer.
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