La protection de la santé s’avère un droit fondamental. Elle est garantie multiplement : formation des professionnels, respect de la dignité, non discrimination de l’accès à la prévention ou aux soins, respect de la vie privée, secret médical, prise en charge médicale adéquate, ou encore suivi scolaire pour les mineurs hospitalisés, évaluation et certification des établissements de santé, libre choix de son praticien ou de son établissement de santé, accès aux soins palliatifs[1]…. Le patient peut donc s’appuyer sur de nombreux droits.
Face à lui, « le médecin est sachant : il le conseille, le soigne, diagnostique sa maladie et ensuite propose un traitement. Le praticien a donc plus de devoirs et le patient plus de droits. Toutefois, ces droits ne sont illimités. Dans l’échange, de visu ou par Internet ou SMS, la sincérité du patient s’avère indispensable mais elle n’est pas toujours bien mesurée par l’intéressé. L’établissement d’un mauvais diagnostic ne pourra pas être reproché au médecin si son patient lui a caché certains paramètres essentiels », explique Maître Chrystelle Boileau, avocate spécialisée en droit de la santé.
Tous les droits protégeant la santé des patients, ont été complétés par ceux prévus par la loi du 4 Mars 2002 dite loi Kouchner, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Parmi les points décisifs de ce texte : l’information des usagers du système de santé et l’expression de leurs volontés. Récemment la loi de modernisation du système de santé, adoptée le 17 décembre 2015 ouvre de nouveau droits pour les patients, avec l’action de groupe en santé, le droit à l’oubli pour les anciens malades du cancer et de pathologies lourdes, la suppression du délai de réflexion pour l’IVG ou encore le renforcement de la transparence sur les liens d’intérêt entre industries et professionnels de santé.
Information et consentement
Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions qui lui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que les autres solutions possibles et les conséquences prévisibles en cas de refus. Seule l’urgence ou l’impossibilité d’informer peut dispenser le professionnel de santé de cette obligation.
En outre, aucun acte médical ni aucun traitement ne peuvent être pratiqués sans le consentement libre et éclairé du patient. Ce dernier peut être retiré à tout moment.
En revanche, si les décisions du patient mettent sa vie en danger, il est du devoir du médecin de tout faire pour vous convaincre d’accepter les soins qui s’imposent.
« Les patients ont le devoir de venir en consultation et de prévenir s’ils ne peuvent pas s’y rendre (ce devoir reste, en revanche, pour le patient une simple politesse d'usage dans la mesure où aucune sanction ne peut être appliquée en cas de non respect). D’ailleurs, la prise de rendez-vous par Internet leur facilite la tâche d’autant qu’elle s’accompagne d’alerte par mail ou SMS, avec un rappel de l’heure et du jour de la consultation », estime Chrystelle Boileau.
Désignation d’une personne de confiance et l’interdiction de l’obstination déraisonnable.
Un patient peut désigner par écrit une personne de confiance (parent, proche ou médecin traitant) qui sera consultée si une décision médicale devait être prise à un moment où il ne serait pas en mesure d’exprimer sa volonté. Ce proche peut également assister aux entretiens avec les médecins et aider le patient dans ses démarches et décisions. Toutefois, il ne prendra pas de décisions médicales. Elle sera consultée à titre obligatoire mais le médecin pourra passer outre cet avis pour prendre la décision qu’il jugera la meilleure.
La démocratie sanitaire
« La démocratie sanitaire est une démarche qui vise à associer l'ensemble des acteurs du système de santé dans l'élaboration et la mise en œuvre de la politique de santé, dans un esprit de dialogue et de concertation », selon l’ARS d’Ile de France.
Un rapport remis le 14 février 2014 à la ministre de la Santé, Marisol Touraine, va plus loin en proposant d’organiser le passage à "l’an II de la démocratie sanitaire" 3. L’une des mesures préconisées : la création d’un véritable statut pour les représentants des usagers qui « accéderaient à la formation, seraient défrayés et indemnisés pour le travail effectué. »
Ainsi, la démocratie sanitaire, l’un des trois piliers de la Stratégie Nationale de Santé, a modifié les rapports entre les médecins et les patients, en rendant le patient d’avantage acteur de sa maladie et…surtout de sa guérison.
Dossier médical personnel et dossier médical pharmaceutique
Le législateur prévoit aussi que le médecin coordonnateur des établissements de santé ait accès au dossier médical mais avec le consentement express du patient.
Maître Chrystelle Boileau précise que « dans les réseaux, le partage d’information entre professionnels de santé doit être sécurisé, pour faciliter la prise en charge d’un seul patient par plusieurs professionnels de santé. Cependant, l’accès au dossier médical du patient via Internet n’est pas encore possible. Aujourd’hui, celui-ci devra fournir une pièce d’identité pour le demander et son dossier lui sera adressé par la Poste, en recommandé avec accusé de réception. Une raison pour laquelle l’envoi via Internet n’est pas possible aujourd’hui : la protection des données et le secret médical.
Car pour un tiers, il ne serait, hélas, pas si difficile de créer une fausse adresse email et se faire passer pour un ayant droit du patient, sans pouvoir être retrouvé aisément avec son adresse IP, par exemple par un contradicteur éventuel », estime Maître Boileau.
Christine Colmont
Références :
[1] « L’information du patient, son importance, ses conséquences, droits et devoirs de chacun », Rapporteur : Bernard Decanter, Conseil National de l’ordre des Médecins, 8 décembre 2012, à consulter sur Internet à l’adresse : https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/Linformation_du_patient__CNP_2012.pdf
[2] ARS : http://www.ars.iledefrance.sante.fr/Democratie-sanitaire.81526.0.html
[3] « Rapport à la ministre des Affaires sociales et de la Santé. Pour l'An II de la Démocratie sanitaire », présenté par Claire Compagnon, février 2014, à télécharger à l’adresse suivante :
http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_DEF-version17-02-14.pdf
Nous remercions Maître Chrystelle Boileau, avocate spécialisée en droit de la santé, pour sa précieuse collaboration.
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