LE CONTRAT D’ACCÈS aux soins (CAS) est entré en vigueur le 1er décembre dernier, une victoire pour ses défenseurs. Selon les derniers chiffres de l’assurance-maladie, 10 500 médecins, majoritairement de secteur II, se sont engagés à geler leur pratique tarifaire pendant trois ans. En contrepartie, les cotisations sociales de ces praticiens volontaires seront prises en charge par la Sécu pour la part opposable.
Sur le site de l’assurance-maladie (ameli-direct), la mention de l’adhésion du médecin est précisée (conventionné secteur II avec contrat d’accès aux soins). Marisol Touraine a salué cette « belle étape ».
Reste que plusieurs zones d’ombre subsistent. Tour d’horizon.
• La profession très divisée
À ce jour, un seul syndicat polycatégoriel de médecins, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), défend ouvertement le CAS. Le Syndicat des médecins libéraux (SML) a demandé sans succès une renégociation. Plusieurs syndicats ou organisations (la FMF, les chirurgiens de l’UCDF ou l’Union française pour une médecine libre) restent hostiles au dispositif et ne relâchent pas la pression. Ils ont constitué un collectif qui appelle à la fermeture des cabinets pendant une semaine du 17 mars au 23 mars, en pleine fin de campagne des élections municipales.
Cette opposition hypothèque le succès de cette réforme. Seulement 2 000 praticiens exerçant sur des plateaux techniques lourds (chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens) ont adhéré au CAS (un quart des effectifs totaux) alors qu’ils étaient initialement la cible prioritaire de l’exécutif. Les détracteurs du contrat font valoir que cette réforme a manqué sa cible. « En réalité, le CAS a surtout permis à des centaines de praticiens de secteur I, certes titrés, de bénéficier de dépassements d’honoraires », grince (« off ») ce responsable socialiste.
• Les cliniques rechignent
Localement, la majorité des cliniques privées n’encouragent pas leurs praticiens à adhérer au contrat d’accès aux soins. « Si tout le monde avait soutenu le contrat, les choses se seraient passées de façon plus fluide, c’est évident. Les représentants de l’hospitalisation privée auraient pu s’engager davantage », déplorait récemment Frédéric van Roekeghem, directeur de l’assurance-maladie. (« Le Quotidien » du 5 décembre 2013). On peut comprendre les directeurs qui, dans certains secteurs, n’ont pas forcément envie de se mettre à dos leurs praticiens de blocs opératoires.
Farouche défenseur du contrat, le président de l’Union nationale des médecins spécialistes confédérés (UMESPE-CSMF), le Dr Jean-François Rey, qualifie d’« erreur stratégique » ce choix de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) à un moment où les cliniques « perdent des parts de marché » en raison notamment des « compléments d’honoraires ».
La FHP assume sa position. « Nous sommes en colère car nous n’avons pas été associés aux discussions sur ce contrat. Nous entendons les médecins qui nous disent de rester sur nos gardes car il n’y a toujours pas d’engagement des complémentaires », explique Jean-Loup Durousset, président de la FHP. Il demande aux pouvoirs publics « d’accompagner les plateaux techniques », par des revalorisations ciblées sur certains actes. « Avant de faire la promotion du contrat, nous devons savoir s’il pourra exister dans de bonnes conditions ».
• Complémentaires : à quand le décret ?
Le niveau exact de prise en charge par les complémentaires des dépassements réalisés par les praticiens adhérents du CAS demeure une énigme. Le gouvernement devait initialement préciser les règles dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014. Il a reculé, renvoyant à un décret. Marisol Touraine a affirmé vouloir « redéfinir au début de 2014 » le contenu des contrats responsables aidés fiscalement.
Selon nos informations, ce décret sensible pourrait être renvoyé en avril, après les municipales. « Je souhaite d’une part que les organismes complémentaires offrent un minimum de garanties (qualité et niveau de prise en charge) et d’autre part qu’ils régulent les tarifs pratiqués (sur l’optique, le dentaire et le niveau de dépassement) », déclarait Marisol Touraine au « Quotidien » en décembre.
Le directeur général de la CNAM souhaite que les complémentaires honorent leur parole en garantissant une prise en charge privilégiée des dépassements dans le cadre du contrat d’accès aux soins. De fait, une solvabilisation intégrale du CAS contribuerait sans doute son succès.
Seul hic : au sein de l’UNOCAM, mutuelles, assurances privées et institutions de prévoyance ne sont pas sur la même longueur d’ondes. « Il n’a jamais été prévu que les dépassements d’honoraires du contrat soient pris en charge à 100 % comme certains le réclament », souligne Fabrice Henry, président de l’UNOCAM.
L’avenant 8 évoquait seulement une « incitation » des complémentaires à rembourser « de façon privilégiée » les dépassements du CAS « lorsque les garanties ou les contrats le prévoient ». À l’heure actuelle, « la plupart des contrats responsables remboursent jusqu’à 50 % des dépassements » souligne le Dr Michel Chassang, président de la CSMF.
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