Ils avaient filmé et diffusé une vidéo de l’opération d’un jeune homme empalé sur un potelet de trottoir, après une défenestration… Deux anciens médecins et un ex-soldat du feu des pompiers de Paris ont été jugés le 19 octobre.
Quatre à huit mois de prison avec sursis ont été requis. En septembre 2018, les trois pompiers avaient fait circuler sur les réseaux sociaux des images du jeune homme à l’agonie, au bloc opératoire, dont une vidéo dépeignant l'extraction du potelet du corps inanimé du patient nu, sous les exclamations d'un membre de l'assistance. L’homme de 26 ans était décédé le soir même de l’intervention, à l'hôpital Beaujon de Clichy (Hauts-de-Seine).
Transgression insupportable
Aujourd'hui âgés de 29 et 30 ans, les pompiers ont comparu devant le tribunal correctionnel de Paris, pour avoir fixé ou transmis sans son consentement l'image de la victime se trouvant dans un lieu privé. La mère du jeune homme décédé a réprouvé avec gravité leurs agissements : « On ne peut pas laisser faire ce genre de transgression insupportable ».
La procureure a notamment requis 8 mois d'emprisonnement avec sursis contre le médecin auteur de la vidéo diffusée sur internet. « Je n'ai jamais pensé que cette vidéo-là allait fuiter », s'est défendu ce prévenu, détaillant longuement l'intervention médicale rare qu'il dirigeait ce soir-là.
« C'est vraiment une bêtise »
L'enquête, basée sur 35 témoignages, a montré que les trois militaires avaient pris photos et vidéos dans la salle de déchocage avec leurs téléphones, et les avaient partagées à des confrères soignants ou pompiers, notamment sur WhatsApp. Le responsable de la diffusion de la vidéo au grand public n'a pu être identifié.
Les prévenus et leurs avocats ont affirmé que ces partages avaient été effectués à des fins de « retex » ou « retour d'expérience », pour « améliorer la prise en charge » de victimes dans une situation similaire. « A fortiori lorsqu’ils sont déployés sur une intervention qui avait un caractère exceptionnel pour ne pas dire unique », a insisté l'avocat des médecins, Me Pierre-Henry Lebrun.
« Cette vidéo n'a rien d'un "retex", a recadré l'avocate des deux frères du défunt. On comprend tous, bien sûr, que dans les milieux médicaux, à force d'être aux prises avec des scènes difficiles, les coutures pètent un peu (...) mais qu'on ne vienne pas nous dire avec un ton d'expert-comptable qu'on a fait ça dans le cadre d'une démarche précise », a protesté Me Orly Rezlan. Le parquet a tranché que la fixation de ces images était « prohibée ».
Pour une photo, quatre pompiers avaient posé assis avec le potelet de trottoir ensanglanté. « C'est vraiment une bêtise », a reconnu un médecin.
Le jugement sera rendu le 30 novembre. En février 2021, deux policiers avaient déjà été condamnés à deux mois de prison avec sursis pour avoir diffusé des images de la chute du jeune homme sur le poteau, issues de la vidéosurveillance de la rue.
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