Un schéma national pour les handicaps rares

Mutualiser les expertises

Publié le 03/02/2010
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IL ÉTAIT TRÈS attendu par les personnes qui sont confrontées à des handicaps rares, par leurs familles et par les professionnels qui sont chargés de les accompagner : le premier « schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour les handicaps rares » a été adopté à la fin de l’année dernière par Xavier Darcos, ministre du Travail et de la Solidarité, et Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité (« le Quotidien » du 30 octobre). Doté de plus de 35 millions d’euros sur cinq ans, il doit permettre de regrouper les expertises, de développer le dépistage et l’accompagnement des personnes concernées.

1 déficience + 1 déficience = handicap x 6

Le handicap rare est défini dans le code de l’action sociale et des familles* (article D.312-194) par, tout d’abord, un taux de prévalence inférieur à un cas sur 10 000 habitants. Il est ensuite la conséquence d’une association rare de déficits sensoriels, moteurs, cognitifs ou de troubles psychiques (association d’une déficience visuelle grave et d’une ou plusieurs autres déficiences graves, association d’une déficience auditive grave et d’une ou plusieurs déficiences graves, dysphasie grave associée ou non à une autre déficience ou association d’une ou plusieurs déficiences graves et d’une affection grave, chronique, évolutive telle qu’une affection mitochondriale, une affection du métabolisme, une affection évolutive du système nerveux ou une épilepsie sévère). Enfin, troisième critère, la réponse à ce handicap est complexe. « Elle n’est pas seulement l’addition de celles existant pour les déficiences concernées », explique le Dr Pascale Gilbert, médecin de santé publique expert à la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie), qui a participé au groupe de travail pour la conception du schéma.

L’élaboration du schéma a en effet été confiée à la CNSA, dont le conseil scientifique a créé une commission spécialisée. Cette commission a procédé à treize auditions : associations, gestionnaires d’établissements et de services, les trois centres ressources nationaux. Elle s’est penchée sur les expériences internationales et s’est également inspirée du premier plan Maladies rares. Une convention devrait d’ailleurs être signée courant février avec l’INSERM et des travaux devraient débuter avec Orphanet, la base de données en ligne des maladies rares et des médicaments orphelins.

Telle est l’une des réponses pensées pour satisfaire au premier objectif du schéma, à savoir centraliser et diffuser l’information sur les handicaps rares. « Notamment auprès des médecins qui ne savent pas où trouver cette information et diriger leurs patients », précise le Dr Gilbert. Il est également question dans le schéma de proposer une formation aux professionnels de santé et de l’accompagnement social et médico-social. « Nous devons développer chez les professionnels une vigilance, ce que l’on appelle "lapédagogie du doute", et leur donner les moyens de trouver un soutien à leur réflexion. Une communication pourrait être développée à travers les conférences de doyens, l’Ordre, les URML. Et puis nous devons mettre en place un cadre européen de formation continue. »

Quadrature du cercle.

Le plan prévoit également de « consolider et compléter les expertises spécialisées disponibles ». La mission des trois centres de ressources serait ainsi « confirmée » au sein d’un groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS). La coopération de ces organismes avec les centres de référence maladies rares sera renforcée. Et deux nouveaux centres de ressources nationaux seront créés, l’un pour les handicaps rares et les troubles sévères du comportement, l’autre pour les handicaps rares et l’épilepsie sévère.

Le deuxième grand axe du plan est de « structurer territorialement les expertises et les accompagnements médico-sociaux ». « Nous devons conjuguer la rareté de ces handicaps avec le fait que les populations touchées sont dispersées sur le territoire. C’est la quadrature du cercle. Nous avons pointé du doigt la nécessité de repérer les personnes isolées, ce qui nous permettrait d’améliorer nos connaissances épidémiologiques (voir encadré) . Et puis il faut rendre le diagnostic le plus précoce possible, afin, par exemple, de pouvoir proposer à l’enfant qui devient sourd et aveugle une langue spécifique ».

La DGAS (Direction générale de l’action sociale) pilote le comité de suivi du schéma. Un conseil d’orientation scientifique sera mis en place dans le courant du premier trimestre 2010.

* Le code de l’action sociale et des familles (CASF), créé en 1956, regroupe l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires par lesquelles l’État garantit aux individus un certain nombre de prestations sociales, notamment concernant la famille et l’enfance, les personnes âgées et handicapées ou les personnes immigrées.

AUDREY BUSSIÈRE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8701