Brigitte Bourguignon, la résiliente

Les fracas de l’Histoire expliquent souvent les engagements en politique. Pour la génération de Brigitte Bourguignon, née en 1959 à Boulogne-sur-Mer, privée de grands évènements, la passion politique surgit comme par effraction dans les replis de l’intime. Elle infusera longtemps depuis l’âge de 7 ans, lorsque la petite Brigitte, très bonne élève, est alors privée du prix d’excellence au profit de sa meilleure amie, bien née, mieux née. Plus tard, son père chaudronnier sera l’un des premiers licenciés dans la petite entreprise, victime de la crise économique. « C’est dur de voir son père pleurer pour la première fois lorsque l’on a 15 ans. » En réponse à l’humiliation sociale, la politique est encore hors champ. Ce n’est même pas un thème de débat familial le dimanche. « Je ne connaissais pas les idées politiques de mon père. Il devait toutefois voter à gauche. » Les études supérieures sont aussi pour les autres. Son premier engagement sera son mariage à 20 ans, vite rompu deux ans plus tard. Brigitte Bourguignon travaille comme secrétaire médicale à l’hôpital avant d’entrer dans l’administration territoriale. « Je découvre dans le centre d’action sociale ce qu’est la pauvreté. Il n’y avait pas de RMI, de CM. Notre aide n’était pas suffisante. » Aux grandes idées théoriques, Brigitte Bourguignon privilégie l’action de terrain dans les associations. « Je ne supportais pas cette notion de bienfaisance, de charité et surtout l’idée que pour les autres, c’est déjà pas si mal. » La jeune fonctionnaire crée alors l’une des premières épiceries solidaires. Et plonge dans le chaudron associatif. Le droit à la dignité remplace tous les bréviaires politiques. Faut-il parler de nouvelle naissance ? Au sein des instances départementales, elle rencontre son mentor Dominique Dupilet, député à la tête du département du Pas-de-Calais et son second mari juriste. L’air de rien, c’est le début de la revanche sociale. En plus du travail quotidien et de l’engagement associatif, Brigitte Bourguignon réussit avec succès les concours. Peu à peu, l’idée de l’engagement en politique fait son chemin sous la bannière de Laurent Fabius.

Mais cette trajectoire qui ne relève pas de la ligne droite, aurait pu se briser par la survenue de deux drames familiaux. Brigitte Bourguignon perd à six mois d'intervalle son mari à 40 ans victime d’une rupture d’anévrisme, puis son père d’un AVC. Elle y puise une nouvelle énergie. Le reste n’est que littérature. Elle entre à l’Assemblée nationale en 2012 élue dans une circonscription promise à Jack Lang. En juin dernier, le PS ne lui oppose aucun candidat alors qu’elle s’est ralliée à Emmanuel Macron entre les deux tours de la présidentielle. Son élection à la présidence de la Commission des affaires sociales démontre la capacité à rebondir de Brigitte Bourguignon après son échec à l’élection au Perchoir de l'Assemblée nationale face à François de Rugy. Les blessures intimes, les parcours brisés par les choses de la vie, loin de l’idéologie et de la hache de l’Histoire sont-ils en 2017 la recette pour émerger en politique ?