Ce sont deux « présidentiables », pas forcément spécialistes des enjeux sanitaires mais forcément habités d’une opinion affûtée sur le sujet qui ont échangé sur l’avenir du système de santé le 18 février, lors d’un débat organisé par l’Institut santé, cercle de réflexion de l’économiste Frédéric Bizard. D’un côté : l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve. De l’autre : l’ambitieux maire de Cannes David Lisnard (LR).
Partir des besoins des territoires, maîtriser les comptes publics, investir sur la recherche, opérer un virage prévention et bâtir une stratégie pluriannuelle avec des relais locaux… De nombreux sujets ont fait consensus chez les deux hommes politiques. Mais l’un d’entre eux les a opposés : la régulation à l’installation des médecins. Une ritournelle qui a le vent en poupe avec la proposition de loi du groupe transpartisan mené par Guillaume Garot (PS), désormais soutenue par 237 députés.
La formation, nerf de la guerre
« Il faut faire attention aux sophismes », a d’abord déclaré David Lisnard, avant d’ironiser sur la régulation à l’installation des pharmaciens, introduite sous Pétain. « Quelque 80 années plus tard, les mêmes inégalités d’accès et de répartition frappent les pharmacies. Cette régulation n’a, factuellement, pas permis de les améliorer », a-t-il défendu.
Pour lui, « tout montre que les déserts médicaux sont le résultat de la restriction de la formation ». Une « absurdité », a-t-il ajouté, puisque pléthores d’étudiants souhaitent devenir médecins chaque année, que Parcoursup « ne fonctionne pas » et la réforme PASS/L.AS est « une usine à gaz ». De plus, les étudiants s’installent selon lui près de là où ils ont grandi – quand ils ne partent pas étudier en Espagne, Roumanie ou Belgique, a-t-il dénoncé. « Il nous faut revoir la cartographie de formation et accueillir plus d’internes dans le privé », a-t-il insisté. Et pas question de réguler l’installation car « si vous dites à des jeunes d’aller deux ans quelque part, ils diront qu’ils iront ailleurs ».
Faire primer la logique d’intérêt général
Bernard Cazeneuve a défendu une vision « pragmatique », soulignant que « la liberté d’installation ne permet pas d’éviter les déserts médicaux ». Ainsi, dans une logique d’intérêt général, « si l’État contribue au paiement des études et que la santé publique est une priorité nationale, il est normal qu’il y ait une contrepartie de ceux qui en ont bénéficié ».
Une coercition ? Non, l’ex-premier ministre de François Hollande est plus habile. « Plutôt une contractualisation », laquelle inscrirait la possibilité pour les médecins formés en France « une part de don de soi, d’effort », notamment en début de carrière, dans des territoires qui en ont besoin. Le même principe, a-t-il poursuivi, qui « vaut pour les enseignants, les policiers et les militaires ».
Ce qui n’a pas manqué de faire réagir David Lisnard, qui a dénoncé une comparaison de métiers introduisant une « fonctionnarisation de la médecine », une ineptie selon lui. Celui qui n’exclut pas une candidature à la présidence des Républicains (LR) a également invité à remettre en question le parcours de soins et l’entrée par le médecin généraliste, qui a trop de tâches administratives. Il a en ce sens plébiscité le recours à des accès directs et aux infirmières en pratique avancée.
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