Ainsi, la Drees considère que la hausse tendancielle des arrêts maladie dans le secteur privé et chez les contractuels de la fonction publique s'est accélérée après 2019, « au-delà des effets de la crise sanitaire ». Et pour cause : au cours de la décennie 2010-2019, le nombre de journées indemnisées a augmenté de 2,3 % par an en moyenne pour la maladie, rappelle l'étude. Mais entre 2019 et 2023 et « hors effet Covid » (en retranchant les arrêts pour ce motif), le nombre de journées indemnisées pour arrêt maladie a progressé de +3,9 % en moyenne par an, note-t-elle. Conséquence, la dépense (le montant des indemnités journalières versées pour les arrêts maladie) a progressé de son côté de 6,3 % par an en moyenne depuis 2019, pour atteindre 10,2 milliards d'euros, ajoute-t-elle.

Moins d’arrêts maladie chez les seniors, mais ces derniers sont plus coûteux

L’augmentation structurelle des dépenses d’indemnisation des arrêts de travail s’explique notamment par des facteurs économiques et démographiques. L’inflation des prix à la consommation a en effet déclenché des revalorisations du Smic et des augmentations de salaire dans les entreprises pour soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs. Cela, conjugué au vieillissement de la population, explique 60 % de la hausse des dépenses d'indemnités journalières entre 2010 et 2023, selon la Drees.

Mais les auteurs de l’étude observent également une « hausse de la sinistralité », se traduisant par une hausse de la durée moyenne des arrêts et du pourcentage de personnes indemnisées à âge donné. « La proportion de salariés ayant au moins un arrêt indemnisé au cours de l’année est passée de 25% en 2010 à 26% en 2019 et 28% en 2023 », note-t-elle. Et si le nombre de journées d’arrêt de travail indemnisées est de plus en plus bas avec l’âge, le montant total des indemnités journalières versé au titre des arrêts maladie est d’autant plus élevé que les salariés sont proches de l’âge de départ à la retraite.

La durée, généralement plus longue, des arrêts de travail prescrits aux seniors, conjuguée à leur rémunération, probablement plus élevée que celle de salariés en début de carrière, explique leur coût plus important pour la Sécu en matière d’indemnisation – pour rappel, les indemnités complémentaires maladie obligatoirement versées par les entreprises aux salariés bénéficiant d’au moins un an d’ancienneté complètent les IJ de la Sécu et interviennent en principe à partir du 8e jour d’arrêt pour atteindre un taux de remplacement de 90 %, puis 66 %, de la rémunération brute du salarié.

Les arrêts de travail injustifiés parmi les causes de l’augmentation des dépenses d’IJ

Outre l’augmentation des salaires en fonction de l’inflation et le vieillissement de la population, la Drees évoque également les arrêts de travail injustifiés parmi les causes de l’accroissement des dépenses de la Sécu au titre de l’indemnisation des arrêts maladie. Sous la pression de Bercy, le directeur général de l’Assurance maladie, Thomas Fatôme, s’est pleinement saisi du sujet : environ 7 000 médecins généralistes considérés comme étant trop prescripteurs devaient être contactés par la Cnam depuis septembre pour « échanger sur leurs pratiques et voir s'il y a un moyen de mieux maîtriser la situation », avait-il annoncé dans un entretien accordé aux Échos. Mise en cause plus tôt dans l’année par la Cour des comptes à ce sujet, l’Assurance-maladie avait aussi procédé à la mise sous objectif ou sous accord préalable de plusieurs centaines de médecins afin de freiner de potentiels abus en matière de prescription d’arrêts de travail.