Pour l'instant, tout va mal...L'hôpital public avait l'impression d'avoir tout connu. mais cette fois-ci, la situation est inédite. Le ministère de la Santé et de la prévention a décidé de rompre le cycle de négociations. En tout cas, depuis le 12 mai, persiste le silence radio. "Nous assistons certes à des réunions qui n’ont rien à voir avec les négociations autour des revalorisations, par exemple, sur la gestion de la complémentaire santé des praticiens hospitaliers. Il n’y a, en revanche, aucun calendrier fixé. Je n’ai jamais vu cela dans l’histoire du syndicalisme hospitalier," témoigne le Pr Pr Sadek Beloucif*. Peut-être les hospitaliers font-ils beaucoup de bruit pour rien? Et, le malade en vérité ne serait pas si malade. François Braun récuse en tout cas le diagnostic. "
Si je suis réaliste devant les difficultés, humble mais déterminé devant l’ampleur de la tâche qui nous attend, je ne partage pas pour autant le discours du « tout va mal », ni la représentation catastrophiste d’un hôpital en perdition", a lâché le ministre lors de l'inauguration de SantExpo le 23 mai dernier. Certains signes toutefois témoignent d'une détérioration nouvelle, profonde. "C’est la première fois depuis 1958 que l’on recense moins de candidats aux postes de chefs de clinique que de places disponibles. 15 % des postes ne sont pas pourvus. Nous devrons à terme affronter de grosses difficultés pour nommer les professeurs de médecine de demain. Il y a cinq ans, 30 % de postes vacants étaient recensés dans les disciplines à garde, avec un grand différentiel public/privé, en gynéco-obstétrique, en anesthésie, en imagerie. Désormais le taux a grimpé à 40 %. Et celui dans les autres spécialités médicales s’élève entre 20 à 30 % de postes vacants. Il est temps de se réveiller", poursuit le Pr Sadek Beloucif. Comment alors comprendre cette divergence d'analyse? On ne peut parler de déni au sein du gouvernement. "Certes, réplique le Dr Rachel Bocher. Mais les paroles ne suffiront pas. Les dossiers sont ouverts. Mais ils sont classés sans suite. C’est inacceptable. Les causes de cette situation sont multifactorielles. La prise de conscience est en fait partielle. Citons un exemple de notre quotidien. Les soignants partent dès que possible à la retraite ou en cessation progressive d’activité. C’est un coup dur pour l’hôpital public. C’est la fierté même d’exercer au sein de l’hôpital public qui est désormais en cause. On travaillait pour gagner sa vie mais aussi pour faire du bien. Cette fierté n’existe plus du fait de la multiplication de situations de stress, d’un déficit de moyens, de matériels, de tensions entre collègues, avec la hiérarchie. La seule question soulevée par les politiques est de savoir si l’hôpital va tenir cet été. Nous sommes dans le court terme. Pourtant, on ne peut réaliser des recrutements massifs juste avant l’été. Exemple, je ne sais pas comment fonctionneront les urgences psychiatriques cet été. Résultat, nos gardes devraient débuter à 13h30 au lieu de 18h30. La désorganisation dans les services sera majeure pour les consultations, la prise en charge des patients hospitalisés. Nous sommes dans un état de pénurie de soignants gravissime. S’il n’y a pas de signal fort avant l’été, l’hôpital risque de craquer, en dépit des affirmations d’Arnaud Robinet, le président de la FHF. Des pans entiers de services s’effondrent. Alors, même si la prise de conscience est collective, partagée par les pouvoirs publics et les professionnels. Au final, il ne se passe rien. C’est encore plus rageant."
En réponse à cette situation de crise systémique, les syndicats de médecins, toutefois divisés, ont décidé d'une journée de grève qui s'est déroulée le 3 et le 4 juillet selon les organisations. Faut-il parler d'un coup d'épée dans l'eau? Un seul jour d'arrêt ne paraît pas guère suffisant.
"Peut-être. Mais celui qui ne fait pas de bruit n’est pas entendu. On verra après. Il n’y a rien de plus difficile pour un médecin de se mettre en grève. Il ne sait pas ne pas soigner ! Dès aujourd’hui, la souffrance des soignants se traduit par une réduction du temps de travail. Et c’est redoutable. A partir d’un moment, on ne pourra plus effectuer le chemin inverse. Dans mon service, sur douze médecins, seuls deux sont à temps plein. Tout ne va pas être remplacé par la télémédecine. On n’avait pas imaginé cette situation."
Dans certaines déclarations de syndicalistes, la colère cède à certains moments la place au désarroi, au chagrin ou à la pitié. Comme si la situation était désormais hors contrôle. "En effet, je crains qu’il ne soit trop tard, précise le Dr Rachel Bocher. Il y a toujours des vocations, des passions. Simplement, on les aménage avec une autre façon de vivre son métier. Au final quelle priorité assigne-t-on aujourd’hui au système de santé ? Quelles perspectives se donne-t-on ? J’aime bien citer la phrase de Bernanos, « l’avenir, on ne le subit pas, on le fait ». C’est pourquoi nous avons lancé ce préavis de grève. Cette action ne sera pas isolée. D’autres suivront. Ce ne sera pas une grève sans suite." Faut-il croire au sursault?
président du SNAM-HP
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