Examiné depuis mardi par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, le projet de loi santé est épluché par les députés. Chacun de ces 57 articles et 1 760 amendements (sous réserve de leur recevabilité au regard de la Constitution) est succinctement présenté devant les membres de la Commission qui, ensuite, l’adopte ou le rejette. Après 3 jours intenses de travaux, le texte de Marisol Touraine se voit enrichi d’un certain nombre de dispositions. Adoptées en commission, ces mesures ont de bonnes chances de figurer dans le texte qui sera voté, dans l’hémicycle, par les députés, début avril. Petit tour d’horizon de modifications sur lesquelles il faudra compter… ou pas.
Amendements adoptés en Commission
Tiers payant
Sans surprise, les députés ont adopté, mercredi dans la nuit, l’amendement relatif au tiers payant. Présenté par le gouvernement lui-même, cet amendement fixe les garanties et délais de paiement pour les professionnels ainsi que les étapes du déploiement du dispositif. Le point d’orgue étant le 30 novembre 2017, date à laquelle le tiers payant deviendra un droit pour l’ensemble des Français. Cet amendement n° 1725 prévoit également que l’Assurance maladie et les organismes complémentaires transmettent, au plus tard le 31 octobre 2015, un rapport sur les solutions techniques permettant l’extension du dispositif à tous les assurés. Étant entendu qu’il doit s’agir d’une « solution technique commune » aux différents régimes, obligatoire et complémentaires, garantissant un flux unique de paiement aux médecins. Le rôle central de l’Assurance maladie est textuellement affirmé, elle « assume la mission générale de pilotage du déploiement et de l’application du tiers payant ». Une disposition qui provoque la fureur des mutuelles… Les franchises médicales seront, quant à elles, prélevées directement sur le compte bancaire de l’assuré avec l’autorisation.
« Cet article va paralyser le système de soins », a dénoncé le député UMP de Haute-Savoie Bernard Accoyer, l’ancien président de l’Assemblée considérant le tiers payant comme « un marqueur politique, l’entêtement du gouvernement est irresponsable ». S’adressant à Marisol Touraine, Arnaud Richard, député UDI des Yvelines, a confié avoir « le sentiment que le tiers payant est l’assurance-vie de votre présence au gouvernement ». Ce à quoi la ministre a répondu, « quand on défend des mesures de justice et de progrès, on est très vite taxé d’idéologie ».
Plan anti-tabac
Autre sujet non moins sensible : la lutte contre le tabac. Paquet neutre et interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants ont été adoptés par les députés et viendront enrichir le plan anti-tabac du gouvernement. L’interdiction du vapotage dans certains lieux publics et la prohibition de la publicité pour les produits du tabac dans les points de vente, ainsi que celle pour les cigarettes électroniques ont également été décidées.
L’opposition au paquet neutre était vive dans les rangs de la droite. Le député UMP des Bouches-du-Rhône Dominique Tian dénonce un « marketing sanitaire » qui ne résoudra en rien, selon lui, « l’échec français » dans la lutte contre le tabagisme et fera « porter le chapeau » aux buralistes. Du côté de la majorité, en revanche, les députés ont déposé une quinzaine d’amendements venant compléter le dispositif du gouvernement. À retenir notamment celui de la cancérologue et ex-ministre Michèle Delaunay, députée PS de Gironde, qui prévoit que les débits de tabac ne pourront pas ouvrir à proximité des établissements scolaires. Pas sûr toutefois que cette mesure passe l’étape du vote en séance publique.
Salles de shoot, IVG et clause de conscience
L’expérimentation des salles de consommation de drogue à moindre risque, autrement appelées « salles de shoot », a été votée par les députés de la Commission des affaires sociales. Elle est prévue pour une durée de 6 ans. Plusieurs amendements tendant à la suppression de cet article avaient pourtant été déposés par les élus de droite. Ils pourront toutefois être à nouveau les présenter, avant l’examen du texte dans l’hémicycle.
S’agissant de l’interruption volontaire de grossesse (IVG), les députés ont voté la suppression du délai de réflexion de 7 jours, prévu entre les deux consultations obligatoires. Un autre amendement relatif à l’IVG proposait de supprimer la clause de conscience propre à cet acte médical. Ayant reçu « un avis résolument défavorable » de Marisol Touraine », il a été retiré par son auteure, la députée PS Catherine Coutelle.
Amendement refusé en Commission
Lutte contre l’anorexie
L’amendement interdisant l’emploi de mannequins trop maigres et dénutris a été rejeté par la Commission des affaires sociales. Présenté par Olivier Véran, rapporteur PS du projet de loi, et soutenu par le gouvernement, il tendait à lutter contre l’anorexie. À gauche comme à droite, de nombreux députés considéraient qu’une telle mesure introduisait une discrimination à l’embauche. De même, l’amendement de Catherine Coutelle créant un délit d’incitation à l’anorexie a été retiré. Le sujet pourrait toutefois être à nouveau abordé en séance publique, Catherine Coutelle affirmant « nous allons retravailler l’amendement et le présenter en séance publique ».
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