"J’ai besoin de vous pour réussir la transformation du système de santé !" Dans un discours d’une demi-heure, Marisol Touraine a défendu vendredi son projet de loi devant quelques 200 cadres de la CSMF réunis à Lille pour la XXe Université d’été du syndicat. Occasion pour la ministre de la Santé de répondre point par point aux critiques réitérées par Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF décrivant une réforme hospitalocentrée, liberticide et étatiste : "Madame la ministre, nous sommes prêts à travailler avec vous sur une réforme du système de soins, mais pas celle-ci", a martelé le chef de file de la Conf’, exhortant son hôte à construire "une réforme qui s’appuie sur la médecine libérale, qui lui donne les moyens de se moderniser". "Il en est encore temps," a-t-il conclu !
En réponse, la ministre de la Santé n’aura fait aucune concession, mais elle a tenté de montrer aux médecins libéraux que sa réforme n’était pas celle que leurs syndicats vilipendent. "L’épine dorsale de ce projet, c’est la médecine de proximité et les soins de proximité. C’est donc la médecine libérale que je mets en avant", a-t-elle souligné, avant de défendre l’accent mis sur la territorialisation du système de santé, via les ARS : "Qu’on ne me dise pas que j’étatise, quand la médecine libérale conserve la liberté de participer au service territorial," a-t-elle par exemple expliqué. "La loi de santé ne conduit nullement à remettre en cause le cadre national de la politique conventionnelle. L’objectif est d’amener les partenaires à des adaptations au niveau local," a-t-elle aussi insisté, sans sembler vraiment recueillir l’assentiment de son auditoire.
La ministre aura peut-être plus convaincu sur deux aspects phares du projet. A commencer par un argument politique en forme de mise en garde sur la liberté d’installation que la CSMF juge menacée par cette réforme. "Je veux le redire, je ne suis pas favorable à la coercition. Mais si moi je ne défends pas la coercition, il y en a d’autres qui la portent, pas seulement à gauche...", a-t-elle dit, en allusion aux velléités de régulation de nombre de parlementaires...
Enfin, elle s’est attardée sur le principal motif de désaccord avec les médecins libéraux. Sur la généralisation du tiers payant elle a de nouveau promis que le système serait simple, sécurisé et sans surcharge administrative ou financière pour les médecins libéraux : "il ne s’agit pas de transformer les médecins en percepteurs de franchises !" Au-delà, elle a tenté de le faire passer pour un avantage en termes d’attractivité par rapport à l’hôpital où la dispense d’avance de frais est de règle...
Au-delà de cet échange -qui par certains aspects confine au dialogue de sourds- avec la CSMF, Marisol Touraine a profité de son intervention pour régler ses comptes... avec la Cour des Comptes, dont un rapport récent a étrillé la politique conventionnelle de ces dernières années. Evoquant des "temps exigeants", elle est revenue sur le cap mis sur les économies de santé : "J’en ai engagées plus que jamais avant, n’en déplaise à la Cour des Comptes !" Même sentiment du devoir accompli sur la convention médicale : "la politique conventionnelle marche. Et sur les dépassements, les résultats sont là", a-t-elle insisté, citant par exemple un taux de dépassement en baisse de 5 points pour l’activité clinique de 2011 à 2014. Pas sûr que ce soit sur ces deux sujets qu’elle a été le plus entendu par les cadres de la CSMF...
La ministre aura été moins diserte sur les perspectives de revalorisations d'honoraires,se référant surtout aux coups de pouces passés (ROSP, nomenclature des acctes techniques,...). Ce n'est pas faute pour Jean-Paul ortiz d'avoir tenté de l'amener sur ce terrain : "nous souhaitons que vous pesiez sur les arbitrages prochains du PLFSS et que les comptables de Bercy n'aient pas le dernier mot : Madame la ministre, ne les laissez pas étouffer la médecine libérale par le neoud de l'austérité et prendre nos honoraires en otage..." Réponse de Marisol Touraine : "J’annoncerai dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, de nouvelles mesures qui concerneront les généralistes comme les spécialistes et permettront de sécuriser les conditions d’exercice des professionnels." A suivre...
Après deux burn-out, une chirurgienne décide de retourner la situation
La méthode de la Mutualité pour stopper 2,4 milliards d’euros de fraude sociale
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
À la mémoire de notre consœur et amie