Tribune libre

Tabac : de qui se moque-t-on ?

Publié le 24/04/2014
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La politique d’arrêt du tabac en France, comme chez beaucoup de nos voisins, repose essentiellement sur la hausse du prix du paquet de cigarettes et l’utilisation de dispositifs de sevrage tabagique qui ont fait la preuve de leur totale inefficacité du moins chez les fumeurs invétérés. Depuis une décennie environ, le nombre de fumeurs réguliers en France, hommes et femmes confondus, reste fixé au dessus de la barre des 30 %. Pourtant, depuis une décennie le prix du tabac a augmenté de 84 %... Quelques incorrigibles optimistes pensent pourtant que l’échec viendrait d’une augmentation insuffisante !

De qui se moque-t-on ?

Des fumeurs indiscutablement qui, si cette politique rapporte à l’État, aux laboratoires pharmaceutiques et aux cigarettiers, paient un très lourd tribut pécuniaire, sans oublier sanitaire à cette politique désastreuse. Et eux seuls !

Pourtant le fumeur irréductible est montré du doigt et accusé de tous les maux ! Demain l’on refusera peut-être à ces captifs du tabac, à ces personnes qui manquent « de motivation », dans notre France où il « était interdit d’interdire », le droit de fumer dans leurs propre appartement, comme aux États-Unis si la copropriété de l’immeuble l’exige !

Certaines personnes - et non des moindres - vont jusqu’à préconiser maintenant la suppression pure et simple de la vente de cigarettes en France ! Ont-ils oublié la période de prohibition de l’alcool aux États-Unis, de sinistre mémoire, qui avait développé les distilleries clandestines, les alcools frelatés, le marché noir, le racket, les gangs, avec comme conséquences sur la population une augmentation importante de malades porteurs de cécité ou de maladies neurologiques graves en relation avec la qualité des alcools vendus ?

Pourtant des traitements efficaces existent déjà. La cigarette électronique en est un. Ce qui ne fait pas nécessairement le bonheur de l’État, des cigarettiers et des laboratoires pharmaceutiques vendeurs de substituts nicotiniques.

Le snus suédois en est un deuxième. Il a fait chuter en Suède les maladies imputables au tabac mais il est, depuis 2004, interdit par la Cour de Justice des Communautés Européennes car considéré comme produit dangereux et son usage refusé, en conséquence, dans les pays de l’Union Européenne.

Un traitement efficace, mis au point par un laboratoire pharmaceutique, est techniquement possible en ce début de XXIe siècle.

Mais cherche-t-on vraiment à s’atteler à ce problème qui constitue pourtant le plus grand désastre sanitaire de l’histoire depuis la nuit des temps ?

* ORL, tabacologue, auteur de « Manuel à l’usage des fumeurs invétérés », Les éditions du Net, septembre 2013

Par le Dr Jean-Jacques Hubinois*

Source : Le Quotidien du Médecin: 9321