C’est en 1970 que Swan et Ganz décrivent un cathéter que l’on peut donc positionner dans l’artère pulmonaire, son extrémité étant équipée d’un ballon capable de suivre le flux cardiaque. Ce cathéter artériel pulmonaire (CAP), qui a été pendant près de trois décennies le mode de monitorage hémodynamique majoritaire en anesthésie-réanimation, est maintenant délaissé pour des techniques non invasives ou moins invasives.
Un profil hémodynamique exhaustif
Mais, s’il est passé de mode, le CAP conserve des indications d’utilisation, et son usage repart même à la hausse aux États-Unis (1). Des études récentes montrent une fréquence d’utilisation proche de 15 % en Europe (2). Le CAP permet de mesurer la saturation veineuse mêlée en oxygène et d’obtenir les informations suivantes : débit cardiaque (parfois en continu), pression artérielle pulmonaire, pression d’occlusion, censée refléter la pression de l’oreillette gauche, pression auriculaire droite. On peut avec ces éléments dresser un profil hémodynamique quasi exhaustif.
De nombreuses études se sont intéressées à l’impact de l’utilisation du CAP en situation aiguë, et n’ont pas trouvé de bénéfices cliniques notables. Néanmoins, et bien que ces études soient critiquables, cette absence de différences témoigne également de l’absence de risque lié à ce dispositif, contrairement à ce qui avait été suggéré par une étude en 1996 (3).
Des situations complexes
Quelles indications pour le CAP en 2019 ? Si la « simple » mesure du débit cardiaque et de la pression auriculaire droite n’est plus une indication à la pose d’un CAP, les situations cliniques où le monitorage des pressions de l’artère pulmonaire est essentiel constituent-elles des indications de choix pour le CAP. Les instabilités hémodynamiques survenant ou pouvant survenir chez des patients avec une insuffisance cardiaque biventriculaire ou une hypertension artérielle pulmonaire verront leur traitement mieux guidé avec un CAP. Il est également recommandé dans le syndrome de détresse respiratoire aiguë (ARDS) avec ou sans sepsis (4), dans les chirurgies majeures, en particuliers thoracopulmonaires (chirurgie cardiaque lourde, greffe pulmonaire…), ou encore pour les patients fragiles faisant l’objet d’une transplantation hépatique. En réanimation chirurgicale polyvalente à Lariboisière, le CAP est régulièrement utilisé dans les situations hémodynamiques complexes, notamment pour les patients polypathologiques ou ayant des antécédents de maladie respiratoire. Cette approche physiologique est par ailleurs très utile pour l’enseignement de nos jeunes collègues.
D’une façon générale, il faut dorénavant considérer que, s’il n’est plus l’outil de monitorage de première intention, le CAP fait partie de l’arsenal de monitorage des patients complexes, et qu’il conserve son intérêt. Si l’usage du CAP, abandonné par de nombreuses équipes, est rare, mais qu’il reste utile, comment maintenir et transmettre les compétences qu’il requiert ? C’est probablement dans ce type de cas que la simulation et le passage systématique par des sites utilisant le dispositif sont à recommander.
Si l’usage du CAP est rare mais qu’il reste utile, comment maintenir et transmettre les compétences qu’il requiert ?
Hôpital Lariboisière (APHP) (1) Pandey A et al. Use of pulmonary artery catheterization in US patients with heart failure, 2001-2012. JAMA Intern Med. 2016 Jan;176(1):129-32 (2) Vincent JLet al. Comparison of European ICU patients in 2012 (ICON) versus 2002 (SOAP). Intensive Care Med. 2018 Mar;44(3):337-344 (3) Connors AF Jr et al. The effectiveness of right heart catheterization in the initial care of critically ill patients. SUPPORT Investigators. JAMA. 1996 Sep 18;276(11):889-97 (4) Vieillard-Baron A et al. Experts’ opinion on management of hemodynamics in ARDS patients: focus on the effects of mechanical ventilation. Intensive Care Med. 2016 May;42(5):739-749
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