Une équipe de l'université d'Oxford, vient de publier un travail dans la revue « British Journal of General Practice », visant à dresser une liste des symptômes, des comorbidités et des caractéristiques démographiques observées chez les patients atteints d'un cancer du pancréas. L'ensemble vise à aider les praticiens à orienter plus rapidement le diagnostic.
Le cancer du pancréas n'est que le 10e cancer le plus fréquent dans le monde, mais il est le 5e en termes de mortalité. Extrêmement agressives, les tumeurs du pancréas ont aussi pour caractéristique d'être souvent détectées tardivement, faute de pouvoir identifier correctement les signaux d'alerte. Près de 70 % des malades sont diagnostiqués avec un cancer de stade IV.
Ce travail a porté sur un total de 24 236 patients diagnostiqués entre 2000 et 2019, et identifiés dans la base de données britannique QResearch. Les auteurs ont « remonté le temps » à partir du diagnostic pour lister tous les symptômes rapportés par les patients au cours des deux ans qui ont précédé le diagnostic. Ces données ont été comparées à celles d'un groupe contrôle.
23 symptômes identifiés
Les auteurs constatent que 23 symptômes, sur les 42 initialement retenus, peuvent, chez ces patients, être associés à un diagnostic ultérieur de l'adénocarcinome ductal pancréatique, dont 9 étaient aussi associés à un risque de diagnostic de tumeurs neuroendocrines pancréatiques. Cela représente 13 symptômes de plus que les 10 qui figuraient dans les modèles de prédiction QCancer.
Dans les conclusions de leur étude, ils séparent ces symptômes en deux catégories : ceux qui sont associés à un risque de diagnostic dans les 3 mois, et ceux plus précoces, associés à un risque de diagnostic dans l'année. Dans la première catégorie, figurent les saignements gastro-intestinaux, l'ictère (dans les deux types de cancer du pancréas) et la dysphagie (spécifique de l'adénocarcinome ductal pancréatique).
Les symptômes plus précoces sont aussi les plus nombreux : diarrhée, changements d'habitudes intestinales, vomissements, indigestion, présence d'une masse et/ou d'une douleur abdominale et perte de poids inexpliquée sont associés à un risque de diagnostic des deux types de cancer du pancréas. L'ictère est considéré comme le symptôme le plus significativement associé, à la fois à l'adénocarcinome ductal pancréatique et à la néoplasie neuroendocrine pancréatique.
La constipation, la présence de selles grasses, la distension abdominale (chez les femmes uniquement), les flatulences, le reflux gastro-oesophagien, la fièvre, la fatigue, la perte d'appétit, les démangeaisons, les douleurs dorsales, la soif et les urines de couleur foncée étaient spécifiques d'un risque d'adénocarcinome ductal pancréatique dans l'année qui suit.
Soif et urines foncées
Parmi ces résultats, la soif et la couleur foncée des urines sont deux nouveaux symptômes fortement associés à l'adénocarcinome ductal pancréatique. Les auteurs formulent plusieurs hypothèses : la soif pourrait être un symptôme expliqué par le diabète de type 2, lui-même associé au cancer du pancréas, tandis que des urines de couleur plus sombre pourraient être causées par un dysfonctionnement progressif du foie ou par l'obstruction de la voie biliaire.
Cette liste de symptômes a été croisée avec les données démographiques (les ressortissants d'Inde et du Bangladesh ont un risque moindre de cancer du pancréas), d'hygiène de vie (les fumeurs et les personnes buvant plus de 3 à 6 verres d'alcool par jour ont un risque augmenté) et les comorbidités (diabète, thromboembolie veineuse, syndrome de Cushing, kystes pancréatiques, cholangite, antécédents familiaux).
Concernant le faible nombre de symptômes associés au diagnostic de tumeurs neuroendocrines pancréatiques, les auteurs estiment qu'il est possible que cela soit dû à l'hétérogénéité des pratiques en matière d'enregistrement dans la base de données.
« Il pourrait être intéressant de voir comment les médecins généralistes parviennent à appréhender et à mener des investigations à partir de ces symptômes quand ils sont rapportés par leurs patients », interrogent les auteurs, qui mènent en ce moment un travail de recherche sur le parcours diagnostic des patients diabétiques atteints de cancer du pancréas.
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