La N-cadhérine associée à la résistance à la castration

Des anticorps, nouvelle voie dans le cancer de la prostate

Publié le 10/11/2010
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De récentes études ont montré qu’un grand pourcentage de ces tumeurs conservent un signal du récepteur aux androgènes. Mais il n’est pas sûr que la réactivation du récepteur aux androgènes soit la seule cause de la résistance à la castration.

Une équipe dirigée par le Dr Robert Reiter (Université de Los Angeles) a comparé l’expression génique entre deux cancers prostatiques greffés chez des souris, l’un androgéno-dépendant (ou hormono-sensible), l’autre résistant à la castration. Résultats : les xénogreffes de cancers prostatiques résistants à la castration hébergent une expression nettement accrue de la N-cadhérine, une molécule d’adhésion cellulaire associée à la transition de la forme épithéliale vers la forme mésenchymateuse.

L’analyse d’échantillons cliniques provenant de patients confirme l’association de la N-cadhérine avec la résistance à la castration.

Lorsque les chercheurs forcent l’expression de la N-cadhérine dans des modèles de cancer de la prostate androgénodépendant (CPAD) non métastatique, la N-cadhérine provoque l’invasion, la métastase et la résistance à la castration des tumeurs prostatiques.

En revanche, des anticorps dirigés contre la N-cadhérine réduisent la prolifération, l’adhésion et l’invasion des cellules de cancer prostatique in vitro. In vivo, ces anticorps ralentissent la croissance des xénogreffes de cancers prostatiques résistants à la castration, bloquent l’invasion locale et la métastase et, à doses plus élevées, entraînent même une régression complète.

« Ces données indiquent que la N-cadhérine est une cause majeure de métastase et de résistance à la castration du cancer prostatique. Une thérapie ciblant ce facteur au moyen d’anticorps monoclonaux pourrait offrir des bénéfices importants », concluent les chercheurs.

Évaluer l’innocuité.

Étant donne l’expression tissulaire étendue de la N-cadhérine (nerfs périphériques, cœur et foie), la toxicité de ces anticorps pourrait être un problème.

Toutefois, les chercheurs n’ont observé aucune toxicité chez les souris, ce qui est prometteur. « Cependant, des études précliniques et cliniques seront nécessaires pour confirmer l’innocuité de cette approche », préviennent-ils.

« Le mécanisme de la résistance a la castration du cancer de la prostate n’est pas complètement connu, et en dépit de nouveaux traitements, la plupart des hommes décèdent de leur cancer, explique au Quotidien le Dr Robert Reiter. Nous avons identifié une nouvelle voie, médiée par la N-cadhérine, qui est nécessaire et suffisante pour la résistance à la castration dans plusieurs modèles de cancer prostatique, et elle est aussi trouvée chez plus de la moitié des hommes qui meurent du cancer de la prostate. Nous avons ensuite montré que des anticorps ciblant cette protéine peuvent ralentir la croissance du cancer de la prostate résistant à la castration, ainsi que ralentir la progression des tumeurs hormonodépendantes vers la résistance a la castration. J’aimerais souligner que la N-cadhérine pourrait être exprimée sur une petite population de cellules cancéreuses ressemblant à des cellules souches. Ces anticorps représentent donc une nouvelle voie thérapeutique prometteuse pour le cancer de la prostate, et ils pourraient agir en conjonction avec les nouveaux anti-androgènes. La prochaine étape sera de mieux comprendre le mécanisme d’action de ces anticorps, et de les humaniser pour l’introduction en clinique. »

Nature Medicine, 7 novembre 2010, Tanaka et coll., DOI: 10.1038/nm.2236

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8854