Alors que, dans de nombreux pays comme le Royaume-Uni, des unités spécifiques pour les adolescents et les jeunes adultes atteints de cancer ont été créées sur tout le territoire depuis un certain nombre d’années, la France n’a pris en compte cette problématique que plus récemment, avec un premier site pilote à l’Institut Gustave Roussy au début des années 2000.
Au moment où le plan cancer 2 prévoyait de définir et de mettre en œuvre un programme d’actions spécifiques pour les adolescents, deux autres unités voyaient le jour : l’une en oncologie à l’Institut Curie, l’autre en hématologie à l’hôpital Saint-Louis. « Suite à l’appel lancé par l’INCa fin 2011, huit projets ont été retenus, qui relèvent globalement de deux types d’organisation, précise le Pr Nicolas Boissel (Saint-Louis, Paris). Soit un service spécifique pour des adolescents et jeunes adultes (AJA), soit une structure ambulatoire, où une équipe fait le lien entre services de pédiatrie et de médecine adulte (oncologue ou hématologue, psychologue, infirmier de coordination, assistant social, éducateur) et identifie les jeunes pour leur proposer un accompagnement adapté ».
Un âge de changements
« Il est essentiel de pouvoir proposer une prise en charge spécifique à cette population de patients qui se retrouvent en minorité dans les services de pédiatrie et de médecine adulte et qui ont des besoins très particuliers », souligne le Pr Boissel. Entre médecine pédiatrique et adulte, les protocoles thérapeutiques sont parfois très différents (type de chimiothérapie et intensité) avec un possible impact sur le pronostic. Il faut raisonner non pas en termes d’âge, mais de pathologie, d’efficacité connue des traitements et d’éventuelle toxicité au long cours. Au niveau des soins, des protocoles transversaux se sont développés, jusqu’alors surtout en oncologie, notamment dans certains sarcomes. Mais l’hématologie suit, avec une homogénéisation des attitudes dans la leucémie aiguë lymphoblastique ou dans la maladie d’Hodgkin, une maladie typiquement AJA.
Une autre spécificité de la prise en charge des adolescents et jeunes adultes découle du fait que ces patients sont en transition entre l’enfance et l’âge adulte et subissent de nombreux changements, physiques et psychiques, mais également sociologiques. Les contraintes induites par la maladie et les traitements, qui peuvent durer de nombreux mois, viennent chambouler les projets d’études, de mobilité ou les premières amours et se confronter à l’impression d’invulnérabilité classique à cet âge.
Il faut donc créer un environnement adapté, avec un accompagnement psychologique spécifique, des solutions adéquates pour la préservation de la fertilité, une adaptation de la scolarité et une réflexion sur l’après, incluant une surveillance au long cours des effets secondaires des traitements et un projet de réinsertion socioprofessionnelle.
Partenariat avec les associations
Comme le rapporte le Pr Boissel, le plan cancer 3 est à cet égard très ambitieux, puisqu’il vise à organiser au niveau régional et interrégional, avec un maillage territorial, une prise en charge spécifique des AJA. Un enjeu auquel les structures médicales ne pourront répondre (soins, accompagnement psychologique) que dans un partenariat fort avec le monde associatif, qui joue un rôle majeur dans l’accompagnement global des patients.
« La prise en charge des adolescents et des jeunes adultes est encore trop souvent considérée comme une problématique de pédiatres, estime le Pr Boissel. Or, pour dynamiser les projets, une étroite collaboration entre le monde pédiatrique et celui des adultes est indispensable. C’est ce que propose l’association GO-AJA (Groupe onco-hématologie adolescents et jeunes adultes) qui regroupe l’ensemble des professionnels impliqués dans ce domaine et accompagne les futurs projets en s’appuyant sur l’expérience des centres. L’expérience menée à Saint-Louis, pour l’instant la seule unité d’hématologie dédiée aux AJA, souligne bien les spécificités de ces patients, qui remettent en cause nos habitudes de soins et d’organisation. Les soignants et l’hôpital doivent s’adapter, ne serait-ce qu’au rythme de vie de ces jeunes, aux antipodes du rythme hospitalier habituel ».
D’après un entretien avec le Pr Nicolas Boissel, responsable de l’unité fonctionnelle d’hématologie adolescents et jeunes adultes, hôpital Saint-Louis, Paris
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