Cela fait déjà plusieurs années que la cardio-oncologie connaît un fort développement. « Cette sous-spécialité s'intéresse aux relations entre les traitements oncologiques au sens large, y compris la radiothérapie, et les pathologies cardiaques », rappelle le Pr Alain Cohen-Solal, qui préside depuis janvier 2018 le cercle de cardio-oncologie de la Société française de cardiologie.
Des toxicités cardiovasculaires iatrogènes
Initialement, c'est surtout la cardiotoxicité des anthracyclines, responsables d'insuffisances cardiaques de prise en charge difficile, qui a conduit les deux spécialités à se rapprocher. Mais cette classe d'anticancéreux est loin d'être la seule en cause : le trastuzumab peut lui aussi induire une insuffisance cardiaque ; l'immunothérapie, utilisée dans un nombre de cancers de plus en plus large, peut être à l'origine de myocardites graves ; les antiangiogéniques entraînent une HTA, sans compter l'impact délétère à long terme de la radiothérapie sur les coronaires.
Les progrès majeurs dans la prise en charge des cancers s'étant accompagnés d'une augmentation très nette de la survie, les patients guéris sont plus âgés, donc plus susceptibles de présenter une pathologie cardiaque, et, parallèlement, l'augmentation globale de l'espérance de vie fait que de plus en plus de sujets âgés sont traités pour un cancer. De plus, la pratique d'un exercice physique est désormais préconisée en tant que soin de support dans de nombreux cancers, ce qui peut justifier un bilan cardiologique.
Pour toutes ces raisons, plusieurs sessions sont désormais dédiées à ces questions lors des congrès de cardiologie, en France comme à l'international.
« La cardio-oncologie implique une véritable réflexion conjointe des représentants des deux spécialités ; elle ne se limite pas à la réalisation d'une échographie cardiaque chez une patiente traitée par anthracyclines, souligne le Pr Cohen-Solal. Il s'agit de mieux identifier les patients à risque, par exemple hypertendus ou en surpoids, qui doivent bénéficier d'un suivi plus étroit protocolisé. »
Trois universités associées
Pour améliorer la formation des praticiens, Paris-Diderot, Paris 6 et Aix-Marseille se sont unies pour mettre en place un diplôme interuniversitaire de cardio-oncologie. Un groupe de travail a également été créé au sein de la Société européenne de cardiologie.
Dans les services d'oncologie, toute une réflexion est en cours et des unités fonctionnelles de cardio-oncologie voient le jour, dans une approche à la fois très pragmatique et structurée.
La recherche n'est pas en reste, et quelques essais de prévention de la cardiotoxicité des anthracyclines par des bêta-bloquants ou des sartans ont été réalisés, avec des résultats pour l'instant mitigés. « Sans doute faudrait-il mieux cibler les patients, estime le Pr Cohen-Solal. La radiothérapie a de son côté largement évolué, les appareils, plus performants, permettent des traitements plus ciblés, et les coronaropathies postradiques que l'on voit actuellement, reflet des techniques utilisées il y a 10 ou 20 ans, devraient se faire plus rares. »
D’après un entretien avec le Pr Alain Cohen-Solal, hôpital Lariboisière (Paris)
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