Efficace seule ou en association, la curiethérapie (ou « brachythérapie »), exigeante sur le plan de la maîtrise technique, mériterait d’être de pratique plus répandue. Pour preuves, deux nouveaux exemples ont été présentés à Barcelone au congrès de l’ESTRO (European Society for Radiotherapy and Oncology) : en prévention des récidives dans le cancer de la prostate (essai ASCENDE-RT1) et dans les cancers précoces de l’endomètre inopérables.
Dans l’essai canadien randomisé ASCENDE-RT1 (n=398), le risque de rechutes à 5 ans s’est avéré moindre avec la curiethérapie permanente à faible dose (n=198) par rapport à une dose complémentaire de radiothérapie externe (n=200). Alors qu’aucune différence n’était ressortie jusqu’à présent entre les deux options, la tendance favorable de ce résultat laisse penser que la curiethérapie permanente à faible dose pourrait améliorer la survie à long terme. Les patients inclus avaient un cancer de la prostate localisé à haut risque de rechute, qui avait été initialement traité par castration chimique les 8 premiers mois puis par radiothérapie externe (prostate + ganglions locorégionaux) à la dose d’irradiation de 46 Gy. Le groupe radiothérapie externe a reçu 32 Gy additionnels délivrés à dose croissante, soit une dose d’irradiation totale de 78 Gy.
Une toxicité urinaire non limitante mais réelle
Une ombre au tableau cependant. Les chercheurs de Vancouver rapportent que les effets secondaires urinaires sévères étaient trois fois plus fréquents dans le groupe curiethérapie. « La majorité de ces effets secondaires étaient réversibles et temporaires, ou pourraient être améliorés, a tempéré le Pr James Morris, co-auteur de l’étude. De plus, plus de 80 % des patients du groupe curiethérapie n’en ont gardés que très peu voire plus du tout sur le long terme ». Néanmoins à long terme, la prévalence des effets graves reste supérieure, de l’ordre de 8 % par rapport à 2 % dans le groupe radiothérapie externe.
Bien que conscient de la nécessité de limiter la toxicité, le Pr Morris estime que cela ne constitue pas un frein à son utilisation dans le cancer de la prostate. « L’étape suivante, a-t-il précisé, serait de comparer de façon randomisée un boost de curiethérapie avec ses alternatives principales », ces dernières étant la curiethérapie à haute dose temporaire, la radiothérapie stéréotaxique hypofractionnée et l’association chirurgie et radiothérapie postopératoire. Le Pr Philip Poortmans, président de l’ESTRO, a souligné que « la brachythérapie est une modalité de radiothérapie extrêmement efficace et sûre, (...) elle peut avoir un champ d’application plus vaste que simplement les tumeurs très localisées et à faible risque dans le cadre d’association à d’autres techniques ».
Une alternative efficace dans l’endomètre
La curiethérapie a vu son intérêt confirmé dans les cancers de l’endomètre, précoces mais inopérables, au cours de la présentation faite par le Dr Sahaja Acharya, de l’université de Saint-Louis. D’après les données de la base nationale du National Cancer Institute’s (SEER, an anglais pour Surveillance, Epidemiology and End Resultats), l’équipe américaine a apporté pour la première fois la preuve de l’efficacité de la curiethérapie, souvent réalisée en pratique dans cette indication. Bien qu’à un stade précoce, le cancer peut être inopérable, du fait de la présence de co-morbidités ou d’une obésité morbide.
Les chercheurs américains ont utilisé les données de 460 femmes traitées par radiothérapie pour un cancer de l’endomètre de stade 1 entre 1998 et 2011. L’étude a consisté à comparer la radiothérapie externe seule (n=260) à la curiethérapie avec ou sans radiothérapie externe (n=260). La mortalité toutes causes était 13 % plus faible avec la curiethérapie, avec une survie à 3 ans chez 60 % des femmes par rapport à 47 % dans le groupe radiothérapie externe. La supériorité en terme de survie persistait après appariement sur l’âge, le stade et l’année de diagnostic. De plus, la mortalité par cancer de l’endomètre était plus faible à 3 ans chez les femmes traitées par brachythérapie (18 %) par rapport aux autres (26 %).
Pour autant, cette étude n’est pas sans limites. Comme l’a souligné le Dr Acharya, le registre SEER qui représente seulement 28 % de la population, ne renseigne ni sur la dose de rayons ni son volume, ni sur la technique de curiethérapie utilisée ni celle de radiothérapie externe. « Il n’y a pas non plus d’information sur la toxicité liée au traitement », a-t-elle ajouté. Pour le Pr Poortmans : « Dans notre population vieillissante, nous sommes confrontés de plus en plus souvent à des patients qui ont des pathologies malignes mais ne peuvent recevoir le traitement médical le plus approprié. (...) Cette étude souligne l’importance de sélectionner le traitement le plus efficace, même s’il semble plus lourd au premier abord par rapport à une approche plus douce ».
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