Décidément, le microbiote intestinal ne cesse de nous surprendre. Une étude française Institut Gustave Roussy/INSERM/Institut Pasteur/INRA publiée dans Science montre comment la flore intestinale stimule l’immunité pour lutter contre le cancer au cours d’une chimiothérapie par cyclophosphamide. Une étude indépendante américaine confirme le rôle du microbiote dans l’efficacité d’autres anticancéreux.
Les chercheurs français sous la coordination du Pr Laurence Zitvogel, oncologue à l’Institut Gustave Roussy et directrice de recherche unité INSERM « Immunologie des tumeurs et immunothérapie », ont ainsi montré comment le cyclophosphamide entraîne le passage de bactéries intestinales dans la circulation sanguine et les ganglions. Loin d’être néfaste, cet effet secondaire va provoquer une réaction en chaîne en réalité très utile.
« De façon surprenante, la réponse immunitaire dirigée contre ces bactéries va aider le patient à lutter encore mieux contre sa tumeur en stimulant de nouvelles défenses immunitaires », explique le Pr Zitvogel. Cette immunisation anti-bactérienne se solde par le recrutement de lymphocytes effecteurs différents de ceux mobilisés par la chimiothérapie, leur rôle étant d’aider les lymphocytes anti-tumoraux à endiguer la croissance tumorale.
Éviter les antibiotiques
Parallèlement, l’équipe américaine dirigée par Noriho Iida du National Cancer Institute a montré que des souris dépourvues de flore intestinale ou traitées préalablement par un cocktail d’antibiotiques répondaient moins bien à une immunothérapie incluant des CpG-oligonucleotides et aux chimiothérapies à base de platine (cis-platine, oxaliplatine). Dans les travaux français, le cyclophosphamide s’est révélé moins efficace dans un modèle murin dont l’ensemble des bactéries Gram + avait été supprimé du microbiote.
« Après un traitement antibiotique, la composition bactérienne de l’intestin ne revient jamais à sa composition initiale, explique Georgio Trinchieri, l’un des chercheurs américains. (...) La prise fréquente d’antibiotiques au cours de la vie ou pour traiter des infections liées au cancer et à ses effets secondaires pourrait altérer les traitements anti-cancéreux ».
Des pré- ou des pro-biotiques à développer
Les résultats obtenus dans ces deux modèles murins sont-ils pour autant transposables à l’homme ? « Nous disposons de données préliminaires nous faisant penser que oui », répond le Pr Zitvogel. Si tel était le cas, il y aurait à la clef plusieurs applications pratiques.
Outre les conséquences sur la prescription d’antibiotiques, la mesure la plus importante serait de faire une évaluation individuelle du microbiote intestinal avant les séances de chimiothérapie. « L’idée sous-tendant l’analyse du microbiote est de rééquilibrer une flore perturbée, explique le Pr Zitvogel avec enthousiasme. Il faudra d’abord mieux caractériser les bactéries importantes pour ensuite définir les pro- ou pré-biotiques et/ou l’alimentation nécessaires à l’organisme ».
Science, publication en ligne le 21 novembre 2013
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