Cancer de la prostate T3

Les performances de l’IRM pelvienne

Publié le 10/02/2011
Article réservé aux abonnés
1297392279224021_IMG_53332_HR.jpg

1297392279224021_IMG_53332_HR.jpg

L’IRM est indiquée depuis 1991 dans le bilan d’extension locorégionale du cancer de la prostate. Grâce aux progrès technologiques réalisés au cours des dernières années, l’IRM de la prostate est devenue fonctionnelle multiparamétrique. Trois nouvelles séquences ont été développées : l’IRM de perfusion avec rehaussement de la tumeur par injection de gadolinium, l’IRM de diffusion, inspirée de l’IRM cérébrale, et la spectroscopie-IRM qui est une imagerie métabolique. « Aujourd’hui, l’exploration de la prostate par cette technique, quel que soit son objectif, peut difficilement se concevoir sans une IRM multiparamétrique », fait remarquer le Dr Cornud. De fait, comme le stipulent les dernières recommandations de l’Association Française d’Urologie (AFU), les séquences de perfusion et de diffusion « sont désormais incluses dans un examen de routine », en association à l’imagerie T2, et « le couple perfusion-diffusion est le plus utilisé » (1).

Deux solutions.

L’IRM par sonde endorectale permet d’obtenir une résolution inégalable. « C’est encore la référence pour faire le bilan d’extension », indique le Dr Cornud. Cependant, le coût de l’antenne son coût (100 euros, usage unique) constitue un poids non négligeable dans le budget des structures publiques comme privées et son insertion peut être désagréable pour le patient difficile. Pour pallier l’inconvénient de la recommandation actuelle, deux solutions sont possibles : augmenter soit la puissance des aimants, soit le nombre d’éléments (canaux) sur les antennes pelviennes utilisées. Il existe déjà des aimants deux fois plus puissants (à 3 teslas), mais en raison de leur surcoût par rapport aux aimants à 1,5 tesla et de l’absence de cotation, ils ne sont pas une solution d’actualité en France. En ce qui concerne les antennes pelviennes, le nombre de canaux est passé de 8 à 16 puis à 32. Avec une antenne pelvienne 32 canaux, on arrive à localiser des cancers à partir d’un volume tumoral de 0,2-0,5 mm3, car la quantité de signal, le rapport signal sur bruit et la résolution spatiale sont nettement plus élevés que ceux des antennes 8 canaux couramment utilisées en IRM (résolution spatiale de 1,4 mm3), qui ne sont pas assez performantes pour faire le diagnostic d’extension du cancer (stade T3). Les antennes pelviennes à 32 canaux ont une résolution spatiale (0,8-1 mm3) qui se rapproche de celle obtenue avec la sonde endorectale (0,6 mm3). « Si l’on utilise le maximum de la résolution spatiale disponible (aimant 3 teslas et antenne endocavitaire), le seuil est de 0,3 mm», précise le Dr Cornud.

Jusqu’où aller ?

La place de l’IRM pelvienne dans la détection des cancers de la prostate T3 se discute en fonction des besoins, qui dépendent du contexte. « Dans un contexte chirurgical, la résolution spatiale idéale n’est pas le but à rechercher, car la chirurgie des stades T3 limités potentiellement non détectés par l’IRM, même avec l’équipement minimum recommandé (aimant de 1,5 tesla, antenne 32 canaux) est une option thérapeutique admise », explique le Dr Cornud. L’IRM apparaît donc, en combinant ses résultats avec ceux du taux de PSA et des biopsies échoguidées, comme « un excellent examen qui permet de faire la différence entre les malades chirurgicaux et non chirurgicaux ». L’enjeu est important car, avec l’amélioration de la survie des T3 dits focaux ou limités, leur traitement chirurgical peut être envisagé, mais sous condition de marges de résection négatives. Pour les radiologues, la distinction entre les T3 limités et les T3 étendus se fait sur la base d’un seuil de 3 mm d’extension de la tumeur en dehors de la graisse périprostatique mesurée par IRM. Au-dessus de 3 mm, le T3 est considéré comme extensif avec un risque majeur de laisser des marges de résection positives.

L’IRM est également « un bon outil pour décider à partir de quand il faut le traitement chirurgical des T3 n’est plus souhaitable arrêter d’opérer les T3 », note Dr Cornud. Dans les T3a (extension extracapsulaire) massifs ou dans les T3b (envahissement des vésicules séminales) en IRM, dont on sait qu’ils sont à très haut risque, « le traitement radical par chirurgie est controversé et les alternatives doivent être discutées ». À l’inverse, en cas de tumeur à faible risque, accessible à un traitement moins agressif que la prostatectomie radicale (surveillance active ou traitement de la tumeur elle-même par un agent physique, comme la cryothérapie ou les fibres laser), il faut s’assurer à tout prix qu’il n’y a pas de franchissement capsulaire de la tumeur. Dans cette situation, « le débat reste ouvert », aucune stratégie n’ayant encore été validée. Néanmoins, dans ce contexte, estiment les Drs Cornud et Eiss, « la plus grande résolution spatiale possible est probablement souhaitable ».

Perspectives.

Après prostatectomie radicale, le suivi est fondé sur le taux de PSA et l’IRM est peu performante, car l’irradiation de la loge de prostatectomie est décidée à un taux de PSA (<1-2 ng/ml) qui ne permet pas de déceler la récidive. En revanche, après irradiation, cette technique d’imagerie permet de détecter les récidives locales avec une grande sensibilité. Ainsi, « les récidives locales post-radiothérapie constituent une excellente indication de l’IRM », commente le Dr Cornud.

Par ailleurs, le traitement focal du cancer de la prostate, qui offre des perspectives prometteuses, nécessite une localisation précise de la tumeur pour laquelle l’IRM a déjà fait la preuve de son intérêt. Enfin, l’IRM, évite les surtraitements liés à la détection des cancers latents par les biopsies, dont le très petit volume se traduit par une IRM normale. Pour cette raison, son intérêt potentiel en première intention pour localiser les tumeurs de volume significatif a tumeur avant biopsie est en cours d’évaluation.

D’après un entretien avec le Dr François Cornud, service de radiologie, Hôpital Cochin, Paris et le Dr David Eiss, service de radiologie, Hôpital Necker, comité de cancérologie de l’AFU.

(1) Recommandations en onco-urologie 2010 : cancer de la prostate. Prog Urol, 2 010 ; 20(suppl. 4) : S217-S51.

 Dr CATHERINE FABER

Source : Bilan spécialistes